jeudi 2 juin 2016

2 juin 2016, Paris - Congo B, Djibouti, Tchad, RDC : conférence de l’IPDD

L'Initiative Panafricaine pour la Défense de la Démocratie (IPDD) organisait ce jeudi une conférence de presse à l’Hôtel Crowne Plaza, place de la république à Paris. Les intervenants sont de gauche à droite, Mathias Dzon, président de l’ARD au Congo-Brazzaville, Freddy Kita, Coordonnateur du comité de suivi de l’IPDD et Secrétaire général de la Démocratie chrétienne en RDC, Daher Ahmed Farah, président du MRD, parti de l'opposition djiboutienne, actuellement en retrait de la coalition USN, Saleh Kebzabo, Chef de fil de l'opposition tchadienne, président de l’UNDR et candidat probablement arrivé en tête au 1er tour de la présidentielle tchadienne.
Puisque cette conférence suit les présidentielles au Congo B, à Djibouti et au Tchad, c’est sans surprise que la conférence traite en priorité de ces trois pays. Freddy Kita anime le débat et parle pour l’IPDD. Dans ces 3 pays, le point commun est que le président sortant s’est attribué au premier tour plus de 50% des voix réalisant ainsi un ’coup d’Etat électoral de premier tour’.
Mathias Dzon fait le bilan de la mascarade congolaise du 20 mars, après le « coup d’Etat constitutionnel ». Pour lui, Denis Sassou Nguesso est président « de fait », jamais élu, et donc un problème à résoudre pour le pays. Il ironise : « Mobutu s’était attribué le titre de Président à vie, Bokassa d’Empereur, au moins les choses étaient plus clairs ». Lui-même était en faveur du boycott le 20 mars.
Saleh Kebzabo, très applaudi par la salle comme président du Tchad, commence par démentir : il n’était que premier au premier tour et pas encore élu. Comme toujours, très réaliste, encore, il souligne les difficultés des oppositions africaines à lutter ensemble contre les dictatures en Afrique centrale. Comme lundi où il intervenait seul, il décrit le coup d’Etat électoral d’avril en ajoutant quelques éléments, dont le fait que pendant la campagne, l’armée s’était déjà déployée dans tout le pays pour empêcher un « soulèvement ». Il annonce pour l’investiture en août des « actions pacifiques » contre le pouvoir et « un quinquennat d’enfer ». Il précise, pour ceux ou celles qui n’ont pas compris, que quand l’opposition parle de « Gouvernement de salut national », il ne s’agit pas « de gérer le pays », mais de structurer l’opposition pour « une refondation politique », en lien avec « une jeunesse et une société civile combattive ».
Daher Ahmed Farah retrace également les derniers événements à Djibouti. Son parti, le MRD, a poussé la population au boycott de la présidentielle, puisque qu’ « il n’y avait plus aucune chance après la fin de l’accord cadre ». La participation réelle n’a été selon lui que de 20%.
Saleh Kebzabo ne reste que 15 ou 20 minutes à répondre aux questions des quelques journalistes et de la salle. Sur le procès Habré, il demande surtout d’en « relativiser les conséquences », parce qu’il n’y aura rien d’exemplaire,  la preuve étant que les crimes d’Etat ont continué violemment pendant le procès dans plusieurs pays. A ma question sur les missions d’observation de l’Union africaine et sur l’Union européenne, il redit ce qu’il a dit le lundi sur leur inutilité et leur absence de sérieux. Il rappelle que jusqu’en 2008, le Parlement panafricain menait des observations, et qu’il a participé à une mission en 2008 au Zimbawé qui a eu un effet positif (Mugabe a été obligé d’accepter une alternance au parlement, l’une des 5 alternances en dictature depuis 1990), puis que la commission de l’Ua a ensuite empêché ces missions parlementaires de continuer. Il annonce que sur la présidentielle tchadienne, les experts de l’Ue sont eux resté 55 jours, dont 1 mois avant, et ont écrit un rapport très objectif, pas encore publié. Sur le  terrorisme et la collaboration militaire internationale avec les dictatures, spécialement françaises, il ne doute pas que « la phase amoureuse ne va pas durer plus longtemps ».
Daher Ahmed Farah partage l’avis sur les missions d’observation de l’Union africaine. La dernière à Djibouti a duré, comme au Tchad, moins d’une semaine, avec un regard sur 124 bureaux sur 456. La commission de l’Ua avait été saisie en 2013 après l’inversion du résultat des législatives, mais n’a jamais donné de suite. L’Ue n’a « jamais estimé une élection digne d’être observée à Djibouti », et en 2013 avait envoyé des experts 3 mois qui avaient rédigé un « rapport accablant ». En 2016, Guelleh a refusé les experts.
Mathias Dzon parle de la corruption fréquente au Congo B – les gens disent que quelqu’un est « nguirisé », le nguiri étant un sac noir rempli de billets  –  après avoir évoqué le passage de soi-disant enquêteurs de l’Union africaine à la télé congolaise lors de la présidentielle. Il souhaite une refondation de l’Ua.
Freddy Kita souhaite rapidement avec l’IPDD, « saisir la communauté internationale sur les massacres dans plusieurs pays ». Mathias Dzon remarque qu’après les massacres dans le Pool, Denis Sassou Nguesso a envoyé des membres de Caritas Congo avec des militaires, pour faire un rapport édulcoré, à rejeter complètement. Il souhaite que le Conseil de sécurité s’empare de la question du Pool.
Le débat revient assez longuement sur la stratégie du boycott, deux défenseurs du boycott étant à la tribune. L’alternative évoquée est la « mobilisation de la population » pour Mathias Dzon, et la « conscientisation » de militants pour Daher Ahmed Farah. Puis la fin du débat revient sur l’absolu nécessité d’obtenir des élections correctes et transparentes dans les dictatures. Cependant, revendications plus précises sur les processus électoraux et projets d’actions de plaidoyer ne sont pas directement discutées en conférence publique.
Régis Marzin, article écrit et publié le 2 juin 2016

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