dimanche 3 mai 2015

3 mai 2015, Paris, journée mondiale de la Liberté de la Presse

J'ai besoin de sortir de chez moi, de lever la tête du guidon... j'arrive avec un ami blogueur au concert de Reporters Sans Frontières pour écouter un peu de musique et discuter. Je ne connais pas les noms des groupes. Nous nous retrouvons assez vite au village de la presse à faire le point sur la liberté de la presse au Togo, au Tchad ou ailleurs, avec les responsables de RSF et quelques journalistes.
Quand débute un nouveau concert, je remarque une silhouette que je connais bien, un style de tenue de guitare que j'ai déjà apprécié: bon sans mais c'est bien sûr! Je prends en photo les mains de Peter à la gratte, dans Hollysiz, vu par le caméraman de BFM. Excellent groupe! Excellent concert ! 
Et voilà que pour finir la journée, nous nous retrouvons assis à une table avec le fils d'Aimé Césaire, dans une discussion très sympathique! Etonnant!
Quand je reviens chez moi, bien fatigué, le téléphone sonne aussitôt: au Togo, les sites internet d'opposition ont été coupés au moment de l'annonce des résultats frauduleux de l'élection présidentielle ! Il faut d'urgence contacter RSF. C'est incroyable! le dictateur togolais a osé s'attaqué à l'internet libre dans son pays, le jour même où se fêtait dans le monde entier la Liberté de la Presse! Lui aussi est un humoriste confirmé! La pause musicale fût de courte durée.

vendredi 17 avril 2015

16 avril 2015, Aubervilliers, dette et extractivisme

Décidément, çà bouillonne d’idées ! Après l’excellent rendez-vous avec Y’en a marre la semaine dernière, voici que le Grand Bouillon propose une rencontre avec Nicolas Sersiron, président du Comité pour l'annulation de la dette du Tiers Monde (CADTM) - France et auteur du livre « Dette et extractivisme », un livre sorti il y a 5 mois.
Avant la discussion, le film « Kel dette ? » de Michel Crozas, sur les rappeurs du Sénégal et la dette, est un peu daté et simple, bien que très sympathique et intéressant sur la musique. Entre 2005 et 2012, des associations ont beaucoup demandé l’aide des musiciens pour faire passer des messages à un plus large public, et c’était le cas du CADTM à l’époque du Forum Social Mondial de Dakar en 2011. Cela a assez bien fonctionné à l’époque. Ce qui est intéressant, c’est de retrouver dans le film le rappeur Fou malade qui était là dans le café une semaine plus tôt.
Du coup, entrainé par Nicolas Sersiron, le débat prend tout de suite un peu de hauteur et de profondeur historique. Il nous explique d’abord ce qu’est l’extractivisme, un « pillage des ressources humaines, naturelles et financières », dont la source remontre 400 ans en arrière, dans une première expansion du commerce européen à l’époque de la conquête de l’Amérique. Il retrace rapidement son parcours, passant par les massacres d’indiens, « génocide » sur certaines îles comme Haïti, l’esclavage, l’indépendance des USA, restants liés à l’Europe, puis un XIXe siècle la conquête de tous les continents, l’avènement de la société de consommation, jusqu’à l’utilisation maximale de la dette odieuse illégitime à partir de 1945 et surtout 1960.
Selon lui, La dette a remplacé les armées coloniales. Entre 1945 et 1960, la Banque Mondiale a commencé a prêté à des pays pas encore indépendants, qui sont devenu indépendants directement endettés. Quelque dizaines d’années de néocolonialisme plus tard, les dettes des pays du sud on servi à imposer, le libre échange, défavorable au pays pauvres, sous la pression des Plans d’ajustement structurel, qui ont fait baisser les budgets de l’éducation et de la santé. Les remboursements en devise ont aussi obligé l’installation de l’exportation des ressources naturelles et l’installation de l’agriculture d’exportation, alors que des pays comme la France écoulaient après 1945 des surplus agricoles. Aujourd’hui un pays comme la Tunisie, qui a chassé son dictateur est encore face à une dette odieuse qui l’oblige à des contorsions.
Le point de vue est vraiment synthétique et les quelques débatteur-se-s autour de la table ont plein de questions, par exemple sur la dette publique en France, en Grèce, les dettes des villes et des individu-e-s. Entre 2007 et 2012, la dette publique française est passé de 1200 à 1800 milliards, les banques ont été sauvées mais les Paradis fiscaux et judiciaires aussi, et le monde compte « 300 milliardaires de plus par an ». Aubervilliers avec les tontines chinoises ou le refus d’emprunter aux banques pour cause de religion musulmane,  est aussi évoqué.
J’avais remarqué avec le film « La fin de lapauvreté », de Philippe Diaz, beaucoup projeté par le CADTM, que ce n’était pas évident d’encaisser le choc d’une analyse sur plusieurs siècles, sans doute parce que l’idée que le monde n’a pas pris la bonne direction depuis longtemps nous plonge dans des abimes de questionnement sur ce qu’il faudrait faire.
Le débat se termine sur l’agriculture et l’alimentation. Nicolas Sersiron dénonce le fléau de l’agriculture productiviste, qui est un « non-sens » et provoque un « maximum de morts », en raison de la destruction de l’agriculture paysanne dans les pays pauvres, l’effet de serre, la faim et la malnutrition, la mal-bouffe et les maladies qui en découlent. Les paysan-ne-s sont entrainé-e-s par l’utilisation d’engrais dans le modèle productiviste (je remarque que certain-e-s démarrent leur profession en s’endettant) puis, tout en devenant patron-ne d’une ferme, sont comme salariés d’une entreprise, d’une grande chaîne, dans laquelle ils ou elles ne sont que des maillons, « extracté-extracteur ».
Je propose quelques nuances sur le néocolonialisme : un modèle initial de 1960 dans les ex-colonies françaises a divergé surtout à partir des années 2000. Des responsabilités se sont partagées, et les efforts et les luttes des africains pour sortir du piège de la dette ou du néocolonialisme ont parfois portés des fruits. Cela conduit à parler aussi des « classes moyennes » en Afrique, et dans les pays riches...
La chaleur de cette fin de journée de printemps, digne du réchauffement climatique, nous aide à nous rassurer avant de partir. La discussion a du mal à s’arrêter, et nous finissons sur l’éloge du régime végétarien !

mercredi 8 avril 2015

8 avril 2015, Aubervilliers, Y'en a marre !

Ce mercredi, au Grand bouillon à Aubervilliers, dans le cadre du festival Banlieues Bleues 2015, le rappeur Fou Malade, qui était il y a quelques semaines retenu prisonnier par Joseph Kabila au Congo Kinshasa, est venu présenter le mouvement sénégalais Y'en a marre. Il est accompagné de la réalisatrice du documentaire "Quitte le pouvoir", Aida Grovestins.
Le documentaire projeté avant la discussion raconte le rôle de Y'en a marre pendant la crise électorale sénégalaise en 2012. A l'époque, le conflit dans une démocratie à peu près correcte en Afrique avait surpris tout le monde. Je n'avais fait attention qu'à la volonté de Wade de baisser de 50 à 25% le pourcentage de vote pour être élu. Si cela n'était pas là une attaque de la démocratie ! Je n'avais pas cru que cela puisse se réaliser, c'était trop énorme et cela n'existait nul par ailleurs. J'avais alors pensé que cela reflétait surtout la volonté de Wade de fixer un rapport de force favorable dans les affaires de corruption concernant son clan après une probable défaite.  
En regardant le film, je comprends que Wade avait en réalité réussi à imposer sa participation au vote pour un 3e mandat, en argumentant hypocritement que la limite était apparue après sa première élection en 2000. Ainsi, s'il n'avait pas réussi à imposer les 25% il avait tout de même réussi à bafouer la constitution sur la limitation du nombre de mandats présidentiels, précédents en cela, Blaise Compaoré, Joseph Kabila, Sassou Nguesso ou Pierre Nkurunziza.
Je remarque grâce au film que les sénégalais-es parlaient déjà de "coup d'Etat constitutionnel". Wade a réussi ce coup d'Etat constitutionnel en focalisant l'attention internationale sur l'histoire des 25%. Par la suite, obtenant 34% au premier tour, il n'avait pas dépassé ces 34% au second tour. Il n'y a pas de mot pour dire le contraire de démocratisation, cela pourrait être un néologisme comme "ditctatorisation". Au moins 34% des électeur-trices sénégalais-es acceptaient la "ditctatorisation". L'expression "coup d'Etat constitutionnel" est maintenant au centre de la communication de la campagne Tournons la page
Dans le film, on voit aussi Y'en a marre qui appelle à ne pas voter Wade. Un ami spectateur demande à Fou malade si, alors, Y'en a marre soutenait Macky Sall qui doit certainement avoir lui-même des défauts. Je confirme ici : le grand démocrate Macky Sall a, par exemple, expulsé le blogueur tchadien Makaila Nguebla sous pression du dictateur sanguinaire, grand ami de Jean-Yves Le Drian, Idriss Déby. Sale histoire ! Je prends la parole pour préciser que c'est la constitution sans laquelle il n'y a pas de démocratie que défendaient les activistes sénégalais, et non un politicien en particulier.
Fou malade raconte aussi le soutien apporté par Y'en a marre et Balai citoyen à Filimbi (coup de sifflet), mi-mars à Kinshasa, et explique les filimbistes sont encore emprisonnés. Entre autres, Fred Bauma de la Lucha et Filimbi, Sylvain Saluseke de Filimbi, l'informaticien Yves Makwambala, et depuis le 7 avril Francis Omekongo, le concepteur du logo de Filimbi, sont emprisonnés sans que leur avocat puisse les voir. Depuis des mois, Joseph Kabila est face à une contestation de sa dictature qui met en évidence la vrai nature de son régime. Dans les dictatures fortes comme dans les démocraties africaines fragilisées, la population est les jeunes en particulier s'organisent ou essayent de le faire malgré la répression, et Y'en a marre est disponible pour venir discuter sans "donner des leçons" et pour "apprendre" des autres. Fou malade conclut qu' "une nouvelle génération" veut "bouger pour une transformation globale de l'Afrique".
Article écrit et publié le 12 avril 2015.

lundi 6 avril 2015

6 avril 2015, Paris, les malheurs du Gabon

Ce lundi 6 avril, je suis allé à la conférence "La Françafrique au Gabon, conséquences sociales et économiques d'un pillage érigé en système" alors que je suis vraiment trop fatigué pour suivre correctement. La soirée est organisée par Thomas de Survie dans le cadre d'une tournée en France du syndicaliste Marcel Libama de la « Dynamique Unitaire ».  Les autres intervenants sont les journalistes fuyant la répression Désiré Ename et Jonas Moulenda et le célèbre Marc Ona, de passage à Paris pour Tournons la Page. Il est question des luttes syndicales, des crimes rituels, de la corruption, de l'argent du pétrole, des français au Gabon, de la biométrie de la société française Gemalto en 2013 payée très cher pour très peu de résultats, et de la multitude d'affaires qui affaiblissent correctement "le petit" Ali Bongo en ce moment... à suivre jusqu'à la présidentielle en 2016... Le "petit" pourrait perdre pour de bon si ça continue...
Petit article publié le 13.4.15

jeudi 2 avril 2015

2 avril 2015, Saint-Denis, à propos des Biens mal acquis

A peine 15 jours après la fin de mon exposition photo à Folies d'encre à Saint-Denis, je retrouve la librairie pour une rencontre avec Julien Sole et Xavier Harel sur les "Les bien Mal acquis" autour de la revue dessinée numéro 7 dans le cadre du Festival Hors limite. C'est une nouvelle fois une ambiance très sympathique pour un débat qui devient vite passionnant. La libraire qui a connu François-Xavier Verschave s'intéresse à la Françafrique depuis longtemps.
Le journaliste Xavier Harel est connu pour ses livres, "Afrique pillage à huis clos", en 2006, sur le pétrole, surtout au Congo-Brazzaville, et "Le scandale des Biens Mal Acquis", avec Thomas Hofnung, en 2011. Il a écrit le scénario d'une partie de la revue dessinée numéro 7 sur la Françafrique et les dictateurs, pour le dessinateur Julien Sole. Il résume l'histoire des Biens mal acquis, pour expliquer le contexte du scénario de la bande dessinée, en repartant du rapport du CCFD de 2009 rédigé par Jean Merckaert et Antoine Dulin.
Cela me permet de témoigner sur le partage des rôles au départ vers 2007 entre le CCFD-Terre solidaire entre CCFD et l'association Survie. J'oublie de dire que ce partage des rôles a été discuté au sein d'une plateforme associative parisienne, la "plateforme citoyenne France-Afrique" très active entre 2006 et 2008, environ. Le but était bien de s'attaquer à des acteurs français et africains de la Françafrique et pas seulement aux dictateurs. La disparition de Survie dans la poursuite des plaintes et le suivi par Sherpa et Transparency international a sans doute fait oublier l'importance de Survie dans la problématisation initiale d'une médiatisation des Biens mal acquis, qui connaîtra ensuite un énorme succès et aura un grand impact politique. Des activistes comme Marc Ona et Grégory Mintsa, pour le Gabon, se sont aussi beaucoup impliqués. 
Aujourd'hui, la relation entre les Etats français et équato-guinéen a été profondément atteinte par l'affaire, et la justice n'a pas encore abordé sérieusement le Congo-Brazzaville et le Gabon.
Comment parler de tout cela sans revenir sur le financement des partis politiques et personnalités en France par les dictateurs africains et le poids qui persiste d'un potentiel de chantage. Cela renvoie un moment le débat sur l'évolution de la Françafrique, un sujet qui me tient à cœur. Comme l'affaire des Biens mal acquis a elle-même réussi à affaiblir la françafrique, celle-ci a continué de se transformer: par exemple, les dictateurs ont continué de s'autonomiser et de s'éloigner d'un modèle initial néocolonial resté très stable entre 1960 et 2000, ou encore le marché du pétrole et le lien entre ressources naturelles et politique française ont aussi changé. J'insiste sur la nécessité de bien savoir si l'on parle de "la politique française en Afrique" ou de la "Françafrique", parce qu'une confusion à ce niveau ne permet pas de se mettre d'accord sur un bilan. Le débat autour de la table de Folies d'encres devient alors un peu polémique. Au moins une personne doute que les citoyens 'africains' puissent réussir à sortir leur pays du néocolonialisme. La discussion continue avec plus de précision dans le choix des mots.
Après les BMA, on peut sans doute considérer les élections en Afrique comme un second thème "levier" contre la françafrique. Un effet "levier" se dit d'une action après réduction thématique à un domaine précis qui permet d'agir sur la structure globale. En 2015, le thème de la limitation du nombre de mandats des présidents africains, choisi par la campagne Tournons la page est un nouvel exemple d' "effet levier".
J'ai bien sûr résumé la soirée en mettant l'accent sur ce qui m'avait le plus intéressé. Avec un petit effort de synthèse, on finit par comprendre que si la Françafrique recule, c'est parce que des gens s'activent à la faire disparaître.
Article écrit et publié le 11 avril 2015.

mercredi 1 avril 2015

1er avril 2015, Paris, Tournons la page ! le rapport

1er avril 2015: Tournons la page ! Pas de démocratie sans alternance ! Après le lancement du plaidoyer début février, la campagne Tournons la page prend de l'ampleur et publie son rapport ‘En Afrique comme ailleurs, pas de démocratie sans alternance’. Lire l'article sur le blog Regard * Excentrique. (article ajouté le 5 avril 2015)

mardi 31 mars 2015

Mardi 31 mars, Paris, conférence sur le Burkina Faso

La conférenceInsurrection populaire et transition: Quels changements ?au siège du Parti communiste français est organisée par la Fondation Gabriel Péri. La section française du Mouvement burkinabè des droits de l'homme et des peuples (MBDHP-SF) et des peuples a ‘coorganisé’ la soirée selon son président, Didier Ouedraogo.
Piégé par l’horaire de 18h assez rare, j’arrive très en retard à la fin de la première partie ‘L’insurrection populaire et les enjeux de la transition’ où interviennent Newton Ahmed Barry, le rédacteur en chef de L’Evénement, et Nacanabo Sagado, du Réseau national de lutte anti-corruption (REN-LAC). La chercheuse Lila Chouli anime ce panel. Il est question d’un « coup d’Etat militaire » qui aurait pris le dessus sur l’insurrection selon les deux intervenants, parce que le choix qui a prévalu était celui de « l’armement le plus fort ». Pour Nacanabo Sagado, « les élections ne sont pas le but de la transition ». Selon lui, il s’agit de faire partir les anciens du système toujours là, surtout les militaires, et de ne pas faire de « trêve sociale ». Il va jusqu’à dire « une insurrection populaire est possible », signifiant là son insatisfaction de la révolution-insurrection de fin 2014. Pour Newton Ahmed Barry aussi, « l’insurrection a abouti à un coup d’Etat militaire ». Lui constate qu’il y a deux sociétés civiles, celle, « traditionnelle, absente de l’insurrection », autour des « syndicats qui essayent de revenir » et « celle autour des jeunes, étudiants et du Balai citoyen ».
Je ne pensais pas en arrivant être confronté à cette thèse du « coup d’Etat militaire », qui ne paraît très réductrice. Vérification faite, elle semble surtout très influencée par une certaine vision de la politique burkinabé, une vision proche de celle du Parti communiste révolutionnaire voltaique (PCRV), marxiste léniniste. Les liens entre MBDHP et PCRV sont connus. Les critères marxistes léninistes pour juger d’une révolution sont sans doute plus exigeants en termes de ‘ménage à faire’. Ce qui est surprenant, c’est que la conférence au siège du PCF n’ait pas permis de mieux équilibrer différents points de vue. Le refus d’une trêve sociale pendant la préparation des élections d’octobre 2015 est intéressant, mais cela ne règle pas le débat d’une légitimité du pouvoir pour prendre des décisions pour le long terme.
Le deuxième panel, animé par le blogueur tchadien, Makaila Nguebla, s’intitule « Des répercussions régionales et continentales de la révolte » et réunit Laurent Bigot, ancien du Ministère des affaires étrangères français, dégagé par Laurent Fabius pour avoir prévu en 2012 la chute de Blaise Compaoré, et Albert Bourgi.
Laurent Bigot tient un discours optimiste sur un « long et profond mouvement vers la démocratie », autour des mobilisations citoyennes des jeunes en Afrique, qui me rappelle celui de la campagne Tournons la Page. Pour lui, en plus de l’accès à l’information, une source de changement provient du fait que la population des villes devient majoritaire par rapport à celle des campagnes. Sur le Burkina, il insiste sur la volonté populaire de justice. A la question du public de savoir quel sera le prochain président à tomber, il répond sur le Togo de manière approximative et un peu méprisante pour l’opposition politique, semblant cautionner quelques opinions subjectives. Il suggère que Faure Gnassingbé pourrait gagner l’élection en 2015 sans être capable de finir ensuite son mandat dans un pays « sans soupape ».
Albert Bourgi explique, lui, les conséquences géopolitiques de la disparition de Blaise Compaoré. Il retrace rapidement un historique très lourd. Selon lui, les présidents voisins doivent « mieux dormir maintenant », car il était « l’homme de tous les coups tordus ». Il ajoute que « Blaise Compaoré allait toujours dans le sens de Paris », prenant alors comme exemple la Côte d’Ivoire. Pour Makaila Nguebla Idriss Déby remplace Blaise Compaoré au niveau de l’influence française. Le débat encombré de poncifs est ensuite assez décevant. Il se termine sur l’espoir de Laurent Bigot d’une « diplomatie française » qui, un jour « ferait le choix des peuples », un choix qui serait « bon pour l’économie ».
Article écrit et publié le 6 avril 2015. 

dimanche 29 mars 2015

29 mars 2015, Aubervilliers, Rockestra IV

Conservatoire à Rayonnement Régional, ce dimanche 29 mars: 40 jeunes musicien-ne-s sont sur scène, mélangeant approche classique avec des violons, violoncelles, contrebasses, cuivre, clarinettes et flûtes, et approche de groupe de concert avec claviers, guitare, basse, ordinateur et chant. "Musique actuelle" est le terme convenu, mais il a sans doute peu de sens. Je me dis que les musicien-ne-s en cœur exprime moins leur personnalité individuelle. 
C'est la 4e année pour Rockestra, coordonné par Thibault Renard et Mouloud Choutri. Sans forcer, il y a tout de suite un gros volume, et c'est finalement les 3 chanteuses et le chanteur au clavier qui orientent les morceaux vers le plus d'expression. Je trouve le morceau de Lou Reed superbe, parce ce qu'il correspond le plus à mon goût, mais de nombreux autres morceaux sont magnifiques. 
L'ambiance chauffe à la fin avec des cris d'ados en fond de salle. Puis, ce sont de long remerciements parce que le concert est aussi le résultat d'un travail d'enseignement très local des écoles de plusieurs villes en Seine-Saint-Denis. A poursuivre...

samedi 21 mars 2015

21 mars 2015, Paris, débat sur le Congo Brazzaville

J'arrive très en retard à la Maison de l'Afrique où je n'étais pas venu depuis longtemps, pour un débat sur le Congo-Brazzaville organisé par l'association Congo Ya Sika. L'invitation parlait de "printemps congolais" et de "dialogue national". La conférence est animée par Joseph Ouabari Mariotti, ancien ministre de la justice du président Pascal Lissouba et président de lCongo Ya Sika.
La question discutée est surtout de savoir ce qu'il faudrait faire en cas de dialogue. Le principe même de ce dialogue est évidemment contesté par une partie de la salle. Des arguments existent cependant en faveur de ce dialogue: des demandes diplomatiques en ce sens, semble-t-il venant des USA, de la France ou du Vatican, ou le nouveau contexte régional avec la question de la limitation du nombre de mandats qui va changer rapidement la donne dans les pays voisins, en RDC, au Burundi et au Rwanda autant qu'au Congo Brazzaville. 
Mauvais journaliste qui ne pose même pas de question, je propose ma contribution, en signalant, que même le départ de Blaise Compaoré peut être lié au Grands Lacs, parce que la pression internationale ne pouvait pas diverger, et que dans un 4e pays voisin, le Gabon, le dictateur est de plus en plus fragile. Je conclus sur le fait que la situation au Congo-Brazzaville dépend aussi de l'extérieur, et que cet influence n'est pas facilement maîtrisable et prévisible, qu'il y a actuellement beaucoup de paramètres inconnus, ce qui pourrait impliquer un besoin de réactivité des opposants à Brazzaville pendant les 2 années à venir. 
Le débat se termine par la rédaction d'un communiqué. Pendant le pot final, je signale à un participant qu'il ne faudrait pas que le fait que le déclenchement du déclin de Sassou Nguesso et l'opportunité nouvelle de son départ en 2016 dépendent du sort de son voisin Joseph Kabila, dérange l'organisation de l'opposition au Congo Brazzaville.
Article écrit et publié le 30.3.15

mardi 3 mars 2015

3 mars 2015, Paris, Conférence de presse sur la biométrie électorale au Gabon

Paris, 3 mars 2015 : Conférence de presse sur la biométrie électorale au Gabon et l'entreprise Gemalto, avec de gauche à droite, Me Alain Tamegnon Hazoune, avocat du Conseil représentatif des Associations noires de France (CRAN), Jean Jacques Eyi Ngwa, de l’Observatoire gabonais sur la responsabilité sociétale des entreprises, des administrations et des industries (Ogarseai), Marc Ona, Louis-Georges Tin président du Conseil représentatif des Associations noires de France (CRAN), et 3 membres du CRAN ou de la société civile de Guinée Conakry. Cette conférence de presse impliquait quelques recherches supplémentaires, qui ont abouti en juin 2015 à un dossier : "La biométrie électorale en Afrique, dossier d’information axé sur le cas de la mise en œuvre de la biométrie électorale au Gabon par la société Gemalto". Article publié le 11 juin 2015.

dimanche 1 mars 2015

28 février 2015, Paris 20e, Tony Truant

Un concert mythique de Tony Truant a eu lieu au Relais Belleville, 34 rue de Belleville, ce samedi 28 février. 'Tony Truant et ses Solutions du Gay Paree' jouait avec un guitariste et deux membres des Producteurs de porcs, un groupe que je connais bien, le bassiste et le batteur. 2 heures d'ambiance torride. No comment.

jeudi 19 février 2015

18 février 2015, Paris 18e, Apkass en concert

Apkass donne un concert au Centre Fleury Goutte d'Or à l'occasion de la sortie du livre-disque, "Mais il arrive que la nuit tombe à l'improviste".
Le livre nous permet de découvrir des peintures de Bruce Clarke. Il s'agit surtout du second album, le premier, "En marchant vers le soleil" datant de 2008, et il a été écrit et composé toujours avec Jr EakEe, auquel se sont joints Florent Dupuit et deux documentaristes sonores, Jérémi Nureni Banafunzi et Benoit Thuault. Le groupe s'est reformé avec d'autres musicien-ne-s en plus de Jr EakEe et Alain Kasanda (Apkass) : trompette, flûte et saxophone, percussion, guitare.
La soirée commence par du slam avec les anciens de Chant d'encre, Säb, Edgar Sekloka, Néggus - il manque Gaël Faye - et un autre slameur, Forban. Ensuite, Apkass nous promène entre Paris et Kinshasa, dans une ambiance sonore pleine de références cinématographiques. Comment faire comprendre à un public français la perception d'un habitant du Congo ou d'un migrant à Paris, sans que ce public connaisse l'histoire de ce pays lointain dont on entend surtout parler quand rien ne va ? Au travers de la poésie, c'est un première approche. Comme je suis un peu l'actualité, je sais que derrière la crise actuelle, le massacre des étudiants entre le 19 et le 23 janvier 2015, qu'évoque Alain entre deux chansons, se dessinent des perspectives positives.
C'est un premier concert après 1 an et demi de pause, avec un peu de nervosité. Comme j'avais vu beaucoup des concerts du premier album, j'attends la suite avec impatience. 

dimanche 15 février 2015

14 février 2015, Paris 18e, déjà 7 ans depuis la mort d'Ibni Oumar

Depuis la disparition du professeur Ibni Oumar Mahamat Saleh le 3 février 2008, Idriss Déby est accusé d'être derrière la mort de son principal opposant. Ce samedi, au siège du Parti de Gauche, à Paris, la famille du professeur, ses fils, organisent une commémoration où sont surtout invités des tchadien-ne-s. Une vidéo montre le soutien de nombreux jeunes socialistes réuni-e-s à Malte en 2014 par l'Union internationale de la jeunesse socialiste. Comme une trentaine de représentants jeunes socialistes du monde entier, Laura Slimani des MJS, Benjamin Abtan d'Egam, ou encore Thomas Maes, secrétaire générale des Jeunes socialistes européens, se sont exprimé-e-s pour la défendre la justice sur l'affaire et la démocratie au Tchad. Pendant l'échange qui suit la vidéo, un point rapide est fait sur les procès en cours: le juge parisien prévoit des auditions et des commissions rogatoires au Tchad.
Avant 2012, le Parti socialiste dans son ensemble, ou presque, soutenait la cause de la Vérité et de la justice pour Ibni Oumar. En 2013, suite à la guerre au Mali, la présidence française et le gouvernement, avec en première ligne Jean-Yves Le Drian, ont tenté une véritable réhabilitation internationale d'Idriss Déby, considéré comme utile militairement, au milieu du Soudan, de la Libye, du Mali, du Nigéria, de la Centrafrique (dossier), chef d'Etat du pays stable, stabilisé par l'armée française, la DGSE l'ayant placé au pouvoir en 1990, au milieu des pays instables. Seuls quelques sénateuts socialistes soutiennent encore le combat et demande une Commission d'enquête en France, qui ne risque pas vraiment d'arriver, malgré, ou au contraire en raison, des témoins de l'armée française, dont le colonel Jean-Marc Gadoullet.
Avec la guerre au Nigéria, et Idriss Déby en tête de la coalition africaine contre Boko Haram, l'opposition tchadienne a de nouveau du mal à se faire entendre sur l'état social délabré du pays, et la répression de cette pire dictature des ex-colonies françaises. Le gouvernement français n'a pas encore montré une quelconque volonté de séparer les domaines de "la Paix et la sécurité" et de "la Démocratie et l'Etat de Droit". La politique européenne semble encore soumise à la logique française. Pour l'instant, la communauté internationale a choisi uniquement la coopération militaire au dépens de la population tchadienne, au lieu d'exiger que Déby accepte la possibilité pour l'opposition de s'organiser, la liberté d'expression, et, des processus électoraux crédibles. Même si un soutien de la démocratisation existe, il est loin d'être suffisant pour rendre possible la liberté et une alternance.
En attendant mieux, le Tchad vit toujours en étant considéré comme une zone militaire à gérer à la mode néocoloniale et françafricaine. L'inertie et l'incurie française, tout comme l'historique de l'impunité, entretiennent un cercle vicieux au Tchad, qui ne peut pas progresser dans un processus de démocratisation. La population soufre et essaye d'oublier.

dimanche 8 février 2015

7 février 2014, Paris, Paix et démocratie en Afrique

Le Forum « Dialogue pour la paix en Afrique-2015 : Lutte contre le terrorisme, stabilité démocratique et paix », le samedi 7 février, à Paris, est organisé par  Paris Global Forum de David Gakunzi et le Cabinet AdhocNego de Yannick Biyong. 
Je suis arrivé pour le second panel, manquant l’intervention de Pierre Buyoya, l’ancien Président du Burundi. Le premier panel dont je n’ai écouté que la fin était intitulé ‘Les défis du terrorisme : à menaces globales, quelles réponses globales?’ avec André Bourgeot, CNRS, Jean-Claude Félix-Tchicaya, IPSE, Jean-Pierre Redjekra, enseignant, RCA, Jacky Mamou, Urgence Soudan, Joan Tilouine, modérateur du Monde-Afrique. Cette partie du forum mélangeait des discussions sur la situation en France, par exemple sur le racisme et les conséquences du terrorisme et de l’expertise sur l’Afrique. Par exemple, j’ai retenu juste une dernière idée de Jean-Claude Félix-Tchicaya, à peine esquissée, qu’il peut y avoir des problèmes d’intégration de migrants qui n’auraient pas rencontré suffisamment la culture démocratique dans des dictatures en Afrique, proposition qui n’a pas été discutée. 
Le deuxième panel rassemble, de gauche à droite : Amadou Sylla, politologue, SOS Casamances, Jean-Pierre Vettovaglia, ancien ambassadeur suisse, éditeur du livre ‘Prévention des crises et promotion de la paix’ en 3 tomes et 3000 pages, dont "Démocratie et élections dans l'espace francophone " (vol. 2, 2010), Alira Adissa, modératrice, Christophe Guilhou, Directeur paix, démocratie et droits de l’homme à l’OIF, Emmanuel Dupuy, Président de Institut Prospective et Sécurité en Europe (IPSE), Nestor Bidadanure, philosophe franco–burundais
L’introduction de la conférence autour de multiples questions générales qui demanderaient au moins 10 heures de débat au lieu d’un peu plus d’une heure, indique que les propos ne pourront qu’être très généraux. Jean-Pierre Vettovaglia commence par dire que la réalité est pour l’instant très décevante. Il délimite 3 périodes : 1960-1991, le règne des partis uniques en Afrique contenant les pays occidentaux; 1991-2001, une période post guerre-froide d’exigence démocratique imposée et « politiquement correct », qu’il pense exagérée pour une période trop courte, parce qu’ « En Afrique les chefs ne partagent pas le pouvoir » (Il cite Albert Bourgi), puis 2001-2015, période de focalisation sur la sécurité après l’attentat du 11 septembre. 
Je ne suis absolument pas d’accord avec ce phasage, parce que je propose plutôt, d’après mon schéma ‘Démocratisation et nature des régimes des anciennes colonies françaises: évolution entre 1990 et 2015’: 1960-1990, néocolonialisme français en ce qui concerne les 20 ex-colonies, 1990-1993, période d’instauration du multipartisme par les luttes des peuples, les Conférences nationales souveraines, la modification des constitutions, 1994-1998 période de paroxysme de la Françafrique et de contre-attaque des dictateurs, 1998-2010 stabilisation et usure systémique complexe, avec progrès lent de la démocratie et augmentation de la résistance des régimes dictatoriaux, 2010-2015 augmentation du nombre de pays en transition démocratique, en crise, ou complexes, lutte d’équilibrage entre les focalisation sur la ‘Paix et la sécurité’ et ‘démocratie et Etat de droit’. 
Emmanuel Dupuy fait un exploit en exprimant un maximum d’idées et de connaissances en 10 minutes. Selon moi, il rejoint Jean-Pierre Vettovaglia dans un certain pessimisme, qui pourrait montrer en réalité une mauvaise analyse des équilibres géopolitiques depuis 2010 et surtout 2012. Il ne s’agit pas d’être « optimiste » sur la démocratisation en Afrique comme le serait Pierre Buyoya, mais de mieux d’observer une grande quantité de changements récents qui interfèrent les uns les autres, et de réfléchir sur les modalités pratiques. 
Le philosophe Nestor Bidadanure apporte un point de vue plus un peu plus équilibré, tenant compte d’une expérience traumatisante des Grands Lacs, en exprimant l’idée d’un mélange constant de progrès et d’insuffisances. Il dénonce « l’insécurité à la base quand règne la sécurité au sommet ». Il s’inquiète fortement de la montée d’un « populisme identitaire radical ». 
Amadou Sylla, lui, considère que l’Afrique dans un monde qui change aussi, en particulier en raison de l’économie et des technologies nouvelles, les « destins étant liés », particulièrement ceux de l’Afrique et de l’Europe. 
Christophe Guilhou est Directeur Paix, démocratie et droits de l’homme à l’Organisation Internationale de la Francophonie, la direction « bras armé politique ». En présentant le rôle de la Francophonie sur la démocratie en Afrique, il exprime de loin le point de vue le plus pertinent et le plus actuel. Je suis agréablement surpris parce que je m’attendais à un langage diplomatique moins moderne, moins dans un esprit ‘anglophone’, et piégé par les mauvaises expériences dans les dictatures. 
Il rappelle que l’OIF constitués de 80 Etats membres, travaille autour de textes de références, la déclaration de Bamako de 2000, et la déclaration de Saint Boniface sur la prévention des conflits. Sa particularité est de fonctionner autour de réseaux, par exemple son réseau d’experts électoraux, qui fournit de l’expertise aux Etats. Il s’agit d’une « organisation de coopération intergouvernementale », et elle n’est « pas faite par les oppositions ». Je comprends positivement : sous-entendu, même si les oppositions seraient dans certains pays plus légitimes. 
Le non respect des règles constitutionnelles peut conduire à une exclusion, comme actuellement la Centrafrique et la Thaïlande, mais la Direction Paix, démocratie et droits de l’homme continue de travailler avec ces pays. En Centrafrique, la Francophonie aide sur le processus électoral en préparation pour l’été ou un peu plus tard et la remise en place des institutions. De même Madagascar avait été suspendu 5 ans, et l’OIF y a fait, selon lui, le maximum, pour « mettre sur pied les institutions de la transition ». 
Il indique que l’OIF est intervenu au Togo il y a quelques mois pour que les législatives aient lieu. Et il ne précise rien d’autre, ce qui créerait presque un contresens politique : ces législatives de juillet 2013 étaient organisées après une répression féroce autour de la mascarade judiciaire des incendies, et le résultat global a été inversé en raison de découpage électoral complètement déséquilibré, accentuant l’incohérence entre processus électoraux instrumentalisés par la dictature depuis 2005 et volonté des électeurs. Etait-ce aussi sous-entendu ? Il ajoute aussitôt « L’OIF ne cherche pas la lumière », ce qui est soudain un langage codé bien mystérieux. 
L’OIF a fait 200 missions d’observations, à la demande des Etats, pour un renforcement technique des capacités de ces Etats, par exemple sur les Cours électorales indépendantes. Les observations sont de moins en moins le jour J, parce que selon Christophe Guilhou, les sociétés civiles sont plus à même de se disperser sur un territoire. Là, il ne dit pas évidemment que les observations trop courtes, les choses étant déjà très fraudées en amont puis au niveau du résultat final, étaient à la base de l’instrumentalisation par des dictatures de mission d’observation. Ainsi, en 2009 au Gabon, l’OIF n’a pu que s’avouer vaincue devant le coup d’Etat électoral et que conclure qu’il faudrait « Faire en sorte que les missions électorales de l’OIF puissent participer à toutes les phases de l’élection, en amont et en aval, notamment à la phase de centralisation et de traitement des résultats. » En quittant trop tôt, l’OIF n’avait rien suivi de la gestion du contentieux électoral par la Cour constitutionnelle, le principal point du coup d’Etat électoral qui avait pour complice Nicolas Sarkozy. 
Christophe Guilhou insiste sur la question des nombreuses élections en 2015 et 2016, et sur la question de la limitation du nombre de mandats présidentiels au Burkina Faso et en RDC. Par ailleurs, concernant la ‘gouvernance’, l’OIF soutient la CPI, la construction d’un droits des affaires, participe aux Examen Périodique Universel (EPU) de l’ONU sur les droits humains à Genève, soutient la liberté de la presse, la régulation des media, et l’accès au media pour les oppositions. Il conclut sur la nécessité d’être plus performant, de se renouveler, surtout sur la ‘gouvernance’, parce que le domaine de la démocratie est difficile, et que le travail avec les Etats interdit de « favoriser les oppositions ». Une autre priorité de l’OIF est de favoriser l’expertise africaine. 
Je trouve cette approche pragmatique et a priori plus technique que politique autour des actions de l’OIF intéressante parce que ce type de discours est rarissime en France, même s’il faut décoder les sous-entendus. 
Le retard s’étant accumulé dans la première partie du Forum, il n’est pas possible de débattre, et cette conférence très riche en reste au stade d’introduction à de futurs autres débats. A suivre… puisque de nombreuses élections sont prévues en Afrique en 2015 et 2016.

mardi 3 février 2015

3 février 2015, Paris, Tournons la page !

Tournons la page : le 3 février 2015, l’église catholique congolaise est venu réclamer un soutien européen à la démocratie en Afrique: lire l'article sur Regard*Excentrique.

samedi 24 janvier 2015

24 janvier 2015, Paris, Djibouti : l'USN explique l'accord cadre

L' "accord cadre" du 30 décembre 2014 à Djibouti a été signé entre l'Union du Salut National (USN) et le gouvernement djiboutien avec assez peu de communication publique sur les négociations. La dictature djiboutienne laisse très peu de place à la presse et à une information libre. L'accord découle principalement de la victoire spoliée de l'USN aux législatives de février 2013, qui a été suivi d'une forte répression.
Le représentant de l’Union pour le salut national (USN) en France, Maki Houmed-Gaba présente l'accord cadre. Il explique les 3 points principaux de l'accord: "La réforme de la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) existante en une commission Electorale Nationale Indépendante paritaire, l’Adoption d’un Statut de l’Opposition Politique, l'Intégration des huit députés de l’opposition à l’assemblée nationale". Dans un certain compromis, l'USN accepte donc de ne plus demander la reconnaissance de la véritable assemblée nationale issue du vote de la population pour aller vers des réformes. L'accord n'est pas définitif, il fixe un cadre de négociation. L'assemblée illégitime issue de la fraude électorale de 2013 ne pourra pas modifier les textes issus des négociations. Le public souligne évidemment la nécessité d'une prudence et d'une méfiance, par exemple, parce que l'entourage du président essaiera de faire échouer le processus.
Ce cadre de négociation permettra aussi d'aborder de nombreux points importants pour les processus électoraux futurs et l'établissement de l'Etat de droit, en particulier le point du Conseil constitutionnel, le fonctionnement de la justice, la liberté de la presse et le droit à des media indépendants, de la citoyenneté et de la nationalité, ou même de la décentralisation.
Après des manifestations en 2011, suite à la révolution tunisienne, et l'inversion du résultat global des législatives en 2013, la question de la stabilité de Djibouti a été posée. Face à cette question, en général, la communauté internationale favorise les dictateurs et cela a été très souvent dénoncé, en particulier pour l'Union européenne à Djibouti, qui a été accusée de suivre la politique française orientée par le lobby militaire, entre février 2013 et janvier 2014. Cependant, alors que l'année 2013 était marquée par le conflit malien favorable aux dictateurs d'Afrique francophone, en 2014 un rééquilibrage progressif a semblé se faire en faveur des démocrates. A Djibouti, l'argument de la stabilité s'est inversé en 2014 au profit de l'opposition, parce qu'à plus long terme, seule la démocratie garantira cette stabilité et que la démocratie ne peut se mettre en place à partir de l'inversion du résultat global d'une élection. Un cadre de négociation a donc pu être parrainé par une communauté internationale très présente à Djibouti en raison des bases militaires.
La présence de la communauté internationale pour observer la future négociation est essentielle. Sont partie prenantes, l'ONU, l'Union africaine, l'Union européenne, la France, les USA, et même la Chine et le Japon. La position observatrice des USA a été la première à évoluer positivement. La position française a, comme la position européenne, changé en 2014 et la diplomatie a salué l'accord discrètement. Après l'accord, la communauté internationale soutient les négociations et est entrée dans un dialogue avec l'opposition démocratique. Cependant, la communication de la communauté internationale manque de transparence et d'expression d'une logique ferme.
Le président Ismaïl Omar Guelleh sait qu'il ne peut pas gagner la présidentielle de 2016. Il semble prêt à des concessions qui l’amèneraient jusqu'au départ. Si l'USN constate la non-application de l'accord, elle serait amenée à quitter la table des négociations. Elle prévoit une communication régulière à la population.
Globalement, les tensions ont considérablement baissé, et Djibouti est réellement dans une phase d' "apaisement". En 2 ans, les progrès dans la liberté d'expression sont a priori irréversibles. Un second intervenant de l'USN, Ahmed Hachin-Loïta, rassure sur le candidat unique de l'USN en 2016, qui pourrait être issu d'une élection primaire.
A la fin du débat avec la salle, je souligne, quant à moi, l'influence que pourrait avoir un contexte général africain plus favorable à la démocratisation, et dont Ismaïl Omar Guelleh aura aussi à tenir compte. Comme de nombreuses élections auront lieu en 2015 et 2016, l'équilibre entre dictatures et démocraties pourrait évoluer favorablement, et même l'Union africaine qui n'a pas été jusqu'à présent convaincante pourrait être amenée à participer à l'évolution, soutenue par l'Union européenne ou l'ONU, qui s'est déjà emparée de la question des limitations du nombre de mandat présidentiels.
Maki Houmed-Gaba conclut sur la centralité de la mobilisation populaire, pour faire pression, et annonce une nouvelle conférence de presse pour faire le point dans quelques semaines.
Article écrit et publié le 26.1.15, 17h30.

vendredi 23 janvier 2015

Vendredi 23 janvier 2015, Saint-Denis, Ecriture et migrations, le retour

Cet hiver n'est pas très froid, mais il est sans doute éprouvant pour les nerfs. Je suis heureux de me changer les idées en exposant du 20 janvier au 20 février, à la librairie Folies d'Encre de Saint-Denis, avec Henri Bokilo Boursier, Claire Kito, Valérie Pere, et Raluca Vlad pour la sortie de l'ouvrage "Perspectives croisées sur les Écritures en migration(s)". J'y ai installé, au milieu des peintures abstraites, deux photographies de ma série 'Culture rrom en résistance en Seine-Saint-Denis', dans la suite de l’exposition de 2012.
Je me suis permis de rappeler pour l'occasion un événement local sur Saint-Denis en mars 2014, avec une image de la conférence de presse sur l'inscription des Rroms du terrain Voltaire sur la liste électorale". C'est avec plaisir que je parle de fraude électorale, un sujet que je connais bien, pour y travailler sur l'Afrique, et c'est aussi avec plaisir que je m'exprime sur la médiocrité de certains politiques. 
Je reste sur la présentation positive des Rroms, et une seconde photo est encore plus locale. Un œil averti peut y reconnaître en décor la mairie à 100 m de la librairie. Elle date du 17 mai 2014, et présente un moment intime et mystérieux du spectacle de la troupe de danse des enfants et jeunes du Hanul, Chavé Sumnakuné à la Fête de l'insurrection gitane.
Est-ce que la xénophobie contre les Rroms, qui se base surtout sur des préjugés négatifs, n'incorporent pas aussi une espèce de jalousie autour de fantasmes, d'images positives depuis longtemps véhiculées par la littérature, évoquant beauté et liberté ? Est-ce qu'un inconscient collectif n'a pas associé beauté et liberté, et leurs contraires, au mérite, au travail, à une hiérarchie sociale, à l'argent, dans un refus et un déni des parcours sociaux et culturels, originaux, minoritaires, présentant quelques avantages dans une misère qui ne soit ni ouvrière ni paysanne? Ne faut-il pas parfois déconstruire un peu les fantasmes ?
Je ne me pose pas ces questions pendant l'échange lors du vernissage car j'en reste à la question de l'écriture et des migrations. L'échange a un peu de mal à démarrer, comme si le froid du dehors et le béton de l'architecture ambiante retenaient les énergies. Puis le débat se lance, autour du paradoxe de la disparition des frontières physiques, par les voyages, les retours des migrants à leurs origines, puis une réflexion sur le point de vue des populations observant les migrant-e-s et prises elle-même dans les migrations, comme si elles migraient elles-mêmes. 
Le drame de Charlie Hebdo ne nous pousse-t-il pas à approfondir des réflexions déjà entamées pour les améliorer, puis les partager entre nous ? Est-ce que le besoin de se rassurer avec des ami-e-s, de la famille, réelle ou imaginaire, que l'on éprouve dans une période de tension et de dispersion collective d'angoisse ne nous permet pas de progresser vers des solutions pour mieux vivre ensemble ?
Après ce moment d'échange de 30 ou 45 minutes, nous passons un moment très agréable, et, des relations et des convergences naissent autour d'une bonne soupe.

dimanche 21 décembre 2014

21 décembre 2014, Paris, Tchad : conférence du chef de file de l'opposition

Ce dimanche, à l’Agéca à Paris, le Chef de file de l’opposition démocratique au Tchad, le président de l’Union Nationale pour la Démocratie et le Renouveau (UNDR), le député Saleh Kebzabo, vient présenter la situation au Tchad à la diaspora tchadienne. En avril 2011, déjà, j’avais déjà eu l’occasion d’écouter le leader tchadien et compris ce jour-là que le régime tchadien était le pire parmi ceux des ex-colonies françaises. La conférence est également animée par Balaam Facho et Mahamat Zhang.
Saleh Kebzabo présente d’abord le pouvoir tchadien. Sur 150 partis, une centaine sont des alliés du MPS au pouvoir. Le MPS lui-même compte peu de militants. En les faisant dépendre de l’Etat, Déby a transformés les chefs traditionnels en ‘obligés’. Deux familles tiennent le pouvoir, celle de Déby et celle de sa femme.
Il revient sur le conflit au Mali. Des soldats tchadiens se sacrifient, Déby traite ses troupes comme des esclaves et ne représente pas la population tchadienne et, pourtant, les remerciements vont pourtant vers Déby. Il propose aux occidentaux, de faire la différence entre Déby et l’armée tchadienne, pour pouvoir soutenir la démocratie. Saleh Kebzabo évoque aussi les déstabilisations de Déby dans les pays voisins, au Soudan et au Darfour, en RCA en 2012-2013, ou au sud de la Libye. Pour le Nigéria, il évoque l’amitié avec le sénateur Ali Shérif (SAS) qui investit actuellement dans l'immobilier au Tchad et a été accusé d’avoir lancé Boko Haram, jusqu’à ce que les Services secrets Nigérians démentent le 17 décembre 2014.
« Dans quel pays l’opposition est-elle unie ? L’opposition est plurielle et divisée, mais est capable de se réunir pour prendre le pouvoir, par les urnes » , ce qu’il souligne de son intonation, sans doute avec une sorte de sous-entendu sur les rébellions et politico-militaires. 50 partis environ la composent. 32 députés sur 188 sont très actifs, comme par exemple en ce moment contre le nouveau Code pastoral. L’opposition tchadienne est l’une des plus pauvres d’Afrique, alors que la vie politique a un coût. Il pense cependant qu’il est possible de « faire de la faiblesse une force ». La division Nord-Sud qui correspond à Musulmans-chrétiens est dépassée. Il voit 3 tendances : une opposition qui exige un parlement de transition en 2015 à la place de la prolongation du parlement de 2015 à 2016, une autre qui refuse la candidature de Déby en 2016, et une troisième qui veut respecter la constitutions, en laissant Déby se présenter pour le battre. Un forum mi-janvier permettra de discuter des stratégies.
Selon lui, Déby est moins arrogant depuis la révolution burkinabé et ne veut plus de vagues. Il constate une grande différence entre Burkina Faso et Tchad, avec d’un côté une population politisée, et de l’autre une population qui il y a 20 ans avait tendance à régler les contentieux à coup de fusil. Pour lui, « il n’y a pas de besoin de passer par la rue », et, cependant, « on va apprendre rapidement à être dans la rue ». Le scandale de l’automne, l’affaire de la pénurie de pétrole s’éloigne déjà, et le prix du pétrole étant bas, les salaires ont été payés grâce à une forte amende de la société pétrolière chinoise. Les mouvements spontanés ne sont pas programmables, et l’opposition elle-même est faible.
En 2016, le processus électoral devrait s’améliorer avec la biométrie, avec la disparition du vote multiple qui constituait les 2 tiers des fraudes. Seule la biométrie pour le recensement serait appliquée, car l’opposition ne veut pas de la gestion électorale. Cependant, 15 000 bureaux de votes impliquent 30 000 délégués pour surveiller, et un budget en conséquence. Il appelle la diaspora à soutenir. La métaphore des « lièvres » de la présidentielle de 2011, comme dans une course d’athlétisme, fait sourire la salle. Il espère que l’Union européenne va s’impliquer beaucoup plus sur le processus électoral, ce qui n’est pas assuré.
Sur l’affaire Ibni Oumar Saleh, dont il vient de nouveau de discuter de manière tendue au Ministère des affaires étrangères français, il regrette que l’affaire n’avance pas en France depuis l’arrivée du PS au pouvoir, qu’il y ait un argument de secret-défense qui bloque maintenant la réalisation d’une commission d’enquête au Sénat. Il confirme que la hiérarchie des militaires français interdit de répondre.
Article écrit et publié le 25.12.14

samedi 20 décembre 2014

20 décembre 2014, Paris, Congo B : Sassou Nguesso acceptera-t-il de quitter le pouvoir en 2016 ?

Je me rends à l’Hôtel Holiday Inn à Porte de Clichy ce samedi 20 décembre pour la fin du ‘meeting des Forces du Changement et du Progrès Social Contre le Référendum, le changement de la  constitution et le dialogue de sourds’ où interviennent Wilfrid Ognany, le modérateur, Jean Didier Milebe, du Forum pour l’alternative et la république, Bob Ebaka, de l’association Demain le Congo, John Binit-Dzaba, du Service d’action civile et de résistance (Sacer), Lydie Kolelas, du cercle de réflexion Bernard Kolélas, Joseph Loemba, du Conseil pour la libération et le changement (CLC), Jean-Richard Samba Dia Nkumbi, de l’association Nsimou en mémoire contre l’oubli, Norbert Samouna, du Mouvement pour l’unité et le développement du Congo, Robert Poaty Pangou, de l’ ‘Etat du sud Congo’, Jean-Claude Béri, de Développer autrement le Congo (Dac), et Laurent Dzaba, des Forces du Changement et du Progrès Social, organisateur principal, sur la photo. Je ne connais encore personne. La grande salle est pleine.
Comme François Hollande le lui a rappelé à Dakar, Sassou Nguesso fait face à un verrou constitutionnel qu’il a peu de chance de réussir à supprimer. Il a de quoi être jaloux des autres vieux tyrans de la Françafrique comme Idriss Déby ou Paul Biya qui ont déjà supprimé les limitations du nombre de mandats présidentiels. Dans la constitution du Congo de 2002, l’article 57 l’empêche de faire plus de 2 mandats de 7 ans et la limite de 70 ans de l’article 58, comme il aura 73 en 2016, le bloque aussi. Pauvre dictateur : l'article 185 précise l’interdiction de modifier l'article 57 : « La forme républicaine, le caractère laïc de l'État, le nombre de mandats du président de la République ainsi que les droits énoncés aux titres I et II ne peuvent faire l'objet de révision. » Pour continuer après 30 ans de pouvoir jalonnés de crimes, de massacres, de pillage des richesses, il lui faudrait changer de constitution. Et là, il n’a pas fini de compter les obstacles. Alors qu’avant la révolution burkinabé, cela aurait pu passer comme une lettre à la poste, en apparence, et peut-être en apparence seulement, maintenant, la probabilité de réussir à changer la constitution devient beaucoup plus basse.
Certains systèmes dictatoriaux moins criminel et basé plus sur un parti subsiste après le passage de bâton à un homme de paille, mais sa dictature repose sur son auguste personne et le système est a priori non durable après le départ du chef.
La faiblesse soudainement apparue grâce à la révolution burkinabé est de mieux en mieux comprise, et, toutes les "oppositions" commencent à se réorganiser pour une alternance en 2016. Dans le parti au pouvoir, le Parti congolais du travail (PCT), les divergences sont plus visibles, des anciens ministres du PCT ou des partis alliés cherchent à se rassembler avec des personnalités nouvelles ou moins illustres, des ‘jeunes’ apparaissent. Ce n'est que le début d'un processus qui devrait s'accélérer.
A Paris, se sont fait déjà connaître, les Assises Nationales du Congo pour l'Alternance Démocratique, avec Jean Luc Malékat, Alexis Miayoukou, Benjamin Toungamani et Noël Magloire Ndoba, ou La Ligue Panafricaine du Congo – UMOJA apparue dans les manifestations pour le Burkina Faso, ou encore, autour de Mathias Dzon, un ancien ministre, le groupe de contact des oppositions africaines et un Comité de suivi des  conclusions des rencontres des d'opposants aux réformes constitutionnelles du 14 novembre 2014. La veille, un parti l'Union des Forces de Reconstruction (UFR) de Gérard Milandou lançait un appel pour une nouvelle Conférence Nationale Souveraine. La conférence des Forces du Changement et du Progrès Social organisée surtout par Laurent Dzaba du site Zenga-Mambu, rassemble des personnalités pour un initier un dialogue et des convergences.
Dans la dernière heure de l’événement, Laurent Dzaba revient sur quelques messages consensuels : le refus d’un gouvernement d’union national et d’un dialogue de concertation mené par le régime dans son propre intérêt, la menace de la Cour Pénale Internationale en cas de violences dans les 2 ans à venir, et pour les élections « la reprise du recensement administratif avec la participation de tous et la mise en place d’une commission électorale véritablement indépendante ».
Il y a bien sûr des divergences et un intervenant précise que ne peuvent se rassembler que des personnes auparavant « éparses », et que le dialogue permettra de sortir des « frustrations » qui génèrent les conflits. Il s’agit en particulier d’éviter que le départ de Sassou Nguesso ne réveille une opposition Nord-Sud. Pour celui que certains appellent « le doyen », le problème de Sassou Nguesso est déjà réglé « moralement et politiquement », et il faut surtout voir au-delà de 2016. Pour une autre personne, il faudrait entreprendre une « relecture historique » qui revienne sur le « sang versé ».  
Dans la salle, Pascal Malanda propose sa brochure intitulée ‘Le piège constitutionnel, apaisement ou déchirement, esquisse d’un sursaut national’. Comme au Congo Kinshasa voisin, la question de la limitation du nombre de mandats reste la question principale actuellement au Congo-Brazzaville, et deux jours plus tard, la Conférence épiscopale congolaise, dans un ‘message de Noël’, défend la constitution actuelle et propose que « l’alternance au pouvoir devienne une règle intangible et immuable pour la démocratie » ce qui a provoqué une crise d’urticaire au palais. Sassou Nguesso très soutenu par les dirigeants français à l’époque a fait la guerre entre 1997 et 1999, il n’a pas encore digéré la claque de Dakar et accepté l’idée d’un départ sans résistance en 2016. Les années 2015 et 2016 s'annoncent complexes et sans doute agitées au Congo Brazzaville.
Article écrit et publié le 25.12.14

dimanche 23 novembre 2014

22 novembre 2014, Saint-Denis, pendant l'élection tunisienne

Faire un blog de photographe, çà peut s'avérer compliqué certains jours, si, au retour, les photos ne correspondent pas aux sujets intéressants. Ce samedi, alors que les tunisien-ne-s votaient ici et là-bas, j'ai démarré à l'Embarcadère, la splendide salle d'Aubervilliers, pour la Semaine de Solidarité Internationale, et je suis ensuite parti assez vite à Saint-Denis au festival Bobines rebelles, organisé par les mêmes personnes que la Dyoniversité, pour voir le film 'Démocratie année Zéro' sur la Tunisie
Il y avait à Aubervilliers, organisés par les services de la mairie, des stands associatifs et un débat sur l'agriculture avec des associations d'Aubervilliers, tout cela facile à illustrer par des images classiques. Je m'intéresse à la Semaine de Solidarité Internationale depuis quelques années: au niveau national, elle aurait pu devenir autre chose, mais elle s'est essoufflée. Elle s'est répandue mais pas étendue, parce qu' "il faut savoir s'étendre sans se répandre" comme disait Gainsbourg, dans le naufrage de l'altermondialisme qui l'inspirait au départ, dans une vague d'activités locales qui s’éloignaient de ses objectifs initiaux. Au niveau local, il y a de grandes idées mais elles ne s'additionnent pas, ne se renforcent pas mutuellement, faute de synthèse politique. En l'absence de travail de lien entre les idées et actions, ça se dépolitise très vite. Etait-il possible de faire mieux? Ce n'est pas sûr.
A la bourse du travail à Saint-Denis, la moitié des films étaient annulés à cause d'un problème dans la réservation des salles. Heureusement, le film sur la Tunisie était toujours programmé. Le réalisateur, Christophe Cotteret, était là, mais devait repartir pendant le film, et il ne pouvait pas y avoir de débat, et pas de débat photographiable. Je suis sorti enthousiaste de la jolie salle de projection. J'avais vu le seul et unique film qui traite des luttes sociales, d'une révolution, d'une transition démocratique, des élections, et ce film ne se trompait pas dans les analyses et le commentaire: un très bon film qui mérite d'être soutenu.
Alors, je me suis fait inviter à manger par les organisateurs du festival Bobines rebelles, dans leur local,  dans leur local qui sert aussi pour leur AMAP, merci... Devant nos assiettes de riz pour végétarien, je suis arrivé à parler de Franck Lepage avec mon voisin de table. Franck Lepage, très connu pour ses conférences gesticulées, est un artiste qui a beaucoup inspiré la Dyoniversité au départ. Dans son spectacle sur la culture, il explique qu'une municipalité finance plus facilement un atelier rap où les jeunes insultent la police qu'un atelier qui aide à l'analyse politique. Par défaut de réflexion, la solidarité internationale se confond assez souvent avec l'animation socio-culturelle. Pourquoi pas ? mais il faut en être conscient. Nous étions d'accord.

vendredi 14 novembre 2014

14 novembre 2014, les universitaires et le génocide des Tutsi du Rwanda

Du 13 au 15 novembre, avait lieu à Saint-Quentin-en-Yvelines et à Paris, un colloque international « Rwanda, 1994-2014 : récits, constructions mémorielles et écriture de l’histoire » qui avait la spécificité d'être organisé par les universitaires, ceux et celles du CERILAC de l'Univerisité Paris-Diderot, du Centre d’Histoire Culturelle des sociétés contemporaines de l'Université de Versailles St-Quentin-en-Yvelines et du Labex de l'Université Paris 1 (programme PDF).
Coincé par l'actualité au Burkina Faso et au Tchad, je n'ai pas pu être le jeudi à la table-ronde « La question française » avec Rafaëlle Maison, Gabriel Périès et Jean-François Dupaquier et Raphaël Doridand, l'animateur. Au-delà des faits de complicité de génocide, il était aussi question de la capacité des universitaires à s'organiser, en parallèle de la justice, dans un dossier très verrouillés par les politiques. A la fin de cette année de commémoration très fructueuse, est-il possible de savoir comment la recherche s'organise à plus long terme, entre historien-ne-s, juristes, chercheur-se-s varié-e-s en sciences sociales. Les composantes de l'Etat se désolidarisent face aux activités criminelles, à l'impunité et au déni des responsabilités, mais la question reste sensible et légèrement polémique. La nouvelle génération des lycéen-ne-s et étudiant-e-s, de plus en plus averti-e-s par la somme des publications depuis 20 ans, ne supportera pas le statu quo ou le silence très longtemps, et l'excuse d'attendre la justice ne tient plus.
Le vendredi, j'arrive au début de la table-ronde " Imaginer le génocide. Mémoires croisées" avec Boubacar Boris Diop, Koulsy Lamko, Catherine Coquio, Bruce Clarke, et Virginie Brinker, la modératrice, qui présentent la participation indirecte des artistes à une mobilisation pour la vérité. Même si ces travaux ne sont pas les plus offensifs, ils affermissent symboliquement les gains dans la compréhension populaire.
La journée se termine par un grand entretien avec Patrick de Saint-Exupéry mené par François Robinet. D'autres colloques avait déjà proposé des témoins principaux, et en particulier Bernard Kouchner le 25 mai 2014. Le reporter raconte son périple au Rwanda en 1994, il n'apporte pas d'informations nouvelles pour les connaisseur-se-s. Il s'agit donc d'une présentation plus symbolique qui montre la cohérence entre recherche universitaire et enquête journalistique.
Ce dossier sur la complicité d'Etat dans un génocide met tout le monde sur le même plan, à travailler à déverrouiller les mêmes choses, juristes, juges, historiens, journalistes, associatifs ou élu-e-s. Le militantisme, la prise de risque est partagée. Les progrès des un-e-s et des autres sont immédiatement repris par l'ensemble des acteurs dans une vraie bataille de tranchée. Inversement, il est parfois nécessaire de repousser au fur et à mesure des personnes si une espèce de complicité secondaire se fait sentir, ce qui n'a rien de simple. Les vieux verrous sautent au fur et à mesure que le puzzle se complète, mais si la tâche devient plus facile par le recoupement des données, paradoxalement, elle devient aussi plus délicate et tendue face aux enjeux qui se précisent et aux résistances des accusés.
Patrick de Saint-Exupéry précise pourquoi il est parfois impossible de parler du génocide, pourquoi c'est "indicible". Ce n'est pas parce que c'est "effroyable", c'est parce que l'on ne trouve pas de témoignages, qu'il n'y a pas de traces, de preuves écrites avec des mots, qui auraient pu dire la vérité. Le négationnisme, même au Tribunal Pénal International à Arusha, dans la bouche des avocats des accusés, a continué longtemps à nier le poids des mots correspondants, eux, à la vérité.
Répondant à une question du public, il rappelle sa position, que j'approuve, sur les responsabilités individuelles dans la complicité de génocide:  "Il y avait une politique d'Etat secrète, la France n'était pas au courant". Par ailleurs, "culpabiliser toute la France, ça ne marchera pas", "il faut de la précision dans les incriminations", et on ne peut pas dire qu' "on veut les conclusions avant les enquêtes", ce sur quoi "il y a encore pas mal de travail à faire", parce que "les responsabilités sont multiples". Il conclut sur "la responsabilité, aujourd'hui, pour la presse ou les historiens".
Article écrit et publié le 23 nov. 14