A peine 15 jours après la fin de mon exposition photo à Folies d'encre à Saint-Denis, je retrouve la librairie pour une rencontre avec Julien Sole et Xavier Harel sur les "Les bien Mal acquis" autour de la revue dessinée numéro 7 dans le cadre du Festival Hors limite. C'est une nouvelle fois une ambiance très sympathique pour un débat qui devient vite passionnant. La libraire qui a connu François-Xavier Verschave s'intéresse à la Françafrique depuis longtemps.
Le journaliste Xavier Harel est connu pour ses livres, "Afrique pillage à huis clos", en 2006, sur le pétrole, surtout au Congo-Brazzaville, et "Le scandale des Biens Mal Acquis", avec Thomas Hofnung, en 2011. Il a écrit le scénario d'une partie de la revue dessinée numéro 7 sur la Françafrique et les dictateurs, pour le dessinateur Julien Sole. Il résume l'histoire des Biens mal acquis, pour expliquer le contexte du scénario de la bande dessinée, en repartant du rapport du CCFD de 2009 rédigé par Jean Merckaert et Antoine Dulin.
Cela me permet de témoigner sur le partage des rôles au départ vers 2007 entre le
CCFD-Terre solidaire entre CCFD et l'association Survie. J'oublie de dire que ce partage des rôles a été discuté au sein d'une plateforme associative parisienne, la "plateforme citoyenne France-Afrique" très active entre 2006 et 2008, environ. Le but était bien de s'attaquer à des acteurs français et africains de la Françafrique et pas seulement aux dictateurs. La disparition de Survie dans la poursuite des plaintes et le suivi par Sherpa et Transparency international a sans doute fait oublier l'importance de Survie dans la problématisation initiale d'une médiatisation des Biens mal acquis, qui connaîtra ensuite un énorme succès et aura un grand impact politique. Des activistes comme Marc Ona et Grégory Mintsa, pour le Gabon, se sont aussi beaucoup impliqués.
Aujourd'hui, la relation entre les Etats français et équato-guinéen a été profondément atteinte par l'affaire, et la justice n'a pas encore abordé sérieusement le Congo-Brazzaville et le Gabon.
Comment parler de tout cela sans revenir sur le financement des partis politiques et personnalités en France par les dictateurs africains et le poids qui persiste d'un potentiel de chantage. Cela renvoie un moment le débat sur l'évolution de la Françafrique, un sujet qui me tient à cœur. Comme l'affaire des Biens mal acquis a elle-même réussi à affaiblir la françafrique, celle-ci a continué de se transformer: par exemple, les dictateurs ont continué de s'autonomiser et de s'éloigner d'un modèle initial néocolonial resté très stable entre 1960 et 2000, ou encore le marché du pétrole et le lien entre ressources naturelles et politique française ont aussi changé. J'insiste sur la nécessité de bien savoir si l'on parle de "la politique française en Afrique" ou de la "Françafrique", parce qu'une confusion à ce niveau ne permet pas de se mettre d'accord sur un bilan. Le débat
autour de la table de Folies d'encres devient alors un peu polémique. Au
moins une personne doute que les citoyens 'africains' puissent réussir à
sortir leur pays du néocolonialisme. La discussion continue avec plus
de précision dans le choix des mots.
Après les BMA, on peut sans doute considérer les élections en Afrique comme un second thème "levier" contre la françafrique. Un effet "levier" se dit d'une action après réduction thématique à un domaine précis qui permet d'agir sur la structure globale. En 2015, le thème de la limitation du nombre de mandats des présidents africains, choisi par la campagne Tournons la page est un nouvel exemple d' "effet levier".
J'ai bien sûr résumé la soirée en mettant l'accent sur ce qui m'avait le plus intéressé. Avec un petit effort de synthèse, on finit par comprendre que si la Françafrique recule, c'est parce que des gens s'activent à la faire disparaître.
Article écrit et publié le 11 avril 2015.
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