lundi 29 avril 2013

29 avril 2013, Aubervilliers, débat sur la Tunisie

Quand il y a un événement à Aubervilliers, je ne suis pas inquiet de savoir à l'avance si cela sera bien organisé parce que c'est à côté. Aujourd'hui, je crois donc aller à la mairie pour un débat avec Houcine Abassi, le Secrétaire Général de l’Union Générale Tunisienne du Travail. Mais celui-ci ne reste pas longtemps en raison d'un autre rendez-vous plus important, et il est remplacé par un cadre de l'UGTT. Finalement, il est beaucoup question de Farhat Hached, l’un des principaux chefs du mouvement national aux côtés d’Habib Bourguiba et de Salah Ben Youssef et fondateur de UGTT, parce que Paris inaugure le lendemain une place à son nom, et qu'il y a une forte délégation tunisienne à Paris pour cela. Cette place permettra d'oublier un peu la bourde de la place Bouguiba inaugurée le 20 mars 2013, dictateur qui a torturé une personne présente dans la salle. C'est donc le portrait de Farhat Hached qui est posé devant la tribune. L'ambassadeur de Tunisie, Adel FEKIH, est là aussi. J'ai l'impression que des gens quittent la salle à son arrivée. La salle est pleine de militants, syndicalistes, historiens, par exemple Mustapha Filali, 92 ans. Le débat est original parce que des fortes tensions entre les discours croisent des paroles constructives et optimistes. Il y a plein de non-dits. Houcine Abassi explique la dégradation de la situation : liberté des femmes en danger, liberté de la presse menacée, par exemple par des pressions sur le marché publicitaire, pour empêcher des entreprises de soutenir des media d'opposition au gouvernement Ennhada. Le second représentant de l'UGTT parle en conclusion d' "essai d'instauration d'une autre dictature". L'ambassadeur est plus philosophe et dialectique, et est assez peu convainquant. Je ne comprends pas trop les subtilités de la situation. Un dialogue national doit essayer de sortir le pays du climat de violence depuis l'assassinat de Chokri Belaïd. Pour une personne du public, le conflit principal en Tunisie est social et pas politique. Il est aussi beaucoup question d'histoire, de vérité et de justice sur des crimes coloniaux, dont l'assassinat de Farhat Hached, en 1952, par des agents de l'Etat français. Une personnalité de l'UGTT demande à la France "une justice transitionnelle de la période coloniale" pour obtenir la vérité et la justice sans demande de réparations et de repentances, puisque la Tunisie est elle aussi sur la voie de la justice transitionnelle suite aux crimes de la dictature de Ben Ali. Alors que le maire, M.Salvator, est en retard, Abderrahim Hafidi, le maire-adjoint délégué aux relations internationales, anime avec aisance, un peu à la manière d'un débat de télévision. L'invitation que j'avais reçue indiquait ensuite de la musique à l'Espace Fraternité, et je tombe sur un repas sur invitation ou payant avec un groupe folkorique, soirée à laquelle je n'ai pas l'autorisation de participer. Je ne sais pas si le film sur la délégation albertvillarienne au Forum Social Mondial de Tunis sera finalement projeté. Tout cela est assez improvisé et me fait  faire une petite ballade.

samedi 20 avril 2013

20 avril 2013, Paris, les leaders de "Sauvons le Togo" à Paris

Il est extrêmement rare d'avoir dans une conférence publique, ensemble à Paris, plusieurs leaders démocrates en lutte contre une dictature. A la tribune, de gauche à droite sur la photo ci-dessous, se trouvent Zeus Ajavon, porte-parole du Collectif Sauvons le Togo, Jean-Pierre Fabre, président de l'Alliance Nationale pour le Changement, Agbéyomé Kodjo, président d'Obuts, Olivier Amah de l'Association des Victimes de Torture au Togo (ASVITTO). Cette action de rassemblement est à ajouter au bilan d'un an de lutte du collectif Sauvons le Togo. Ce collectif unitaire a changé la face du pays. La conférence est, elle, organisée par Synergie Togo. 150 personnes surtout togolaises se sont déplacé-e-s à l'Espace Grenelle. Le président de Synergie Togo, Camille Lawson-Body, présente d'abord les aspects importants des législatives. Il insiste sur le découpage électoral inacceptable qui favorise le parti au pouvoir RPT-Unir(-UFC) pour lui permettre une victoire facile avec une minorité de voix. Cela ne peut évidemment rester ainsi. Olivier Amah explique la violence des tortures au Togo, qui montrent la nature du régime. Zeus Ajavon dresse le bilan du CST depuis sa création il y a un an, puis aborde des questions de stratégie: "A chaque élection, ils inventent des méthodes de fraudes nouvelles et cela fait que l'union de l'opposition ne sert à rien." Le CST ne sera jamais pour le boycott: "pas d'accord sur l'organisation des élections, pas de réformes, pas d'élections". Il cite, sans doute sans le savoir, le gabonais Marc Ona: "La peur a changé de camp", la population s'est appropriée le combat. Agbéyomé Kodjo explique comment la mascarade judiciaire a été mise en place pour essayer de détruire l'opposition. Faure Gnassingbé a choisi une stratégie de terreur juste avant les législatives. Lui-même a passé 60 jours en prison pour de fausses accusations et les tentatives d'humiliations et d'atteinte à sa santé se sont ajoutées au coup politique. Le rapport des experts français sur l'incendie est aujourd'hui essentiel. Selon lui "le Togo est en danger, et la communauté internationale doit se mobiliser". Jean-Pierre Fabre insiste aussi sur la mascarade judiciaire de l'incendie (cf texte de son discours). Il lit la lettre, l'une des 2 lettres, car il y en a deux, de l'accusateur principal qui s'est rétracté, Mohamed Loum (photo ci-dessus). Il y a un passage philosophique intéressant : "L'argent peut acheter un lit mais pas le sommeil, une position mais pas le respect." Lui aussi précise qu'il n'y aura pas de boycott
Depuis le début, le fait que l'incendie soit un coup monté du régime togolais est une évidence pour tout le monde. Mais Faure Gnassingbé a agit en plein déclenchement de l'intervention française au Mali, en essayant de profiter de l'immaturité du gouvernement français et des compromissions historiques françaises. Le but du clan dictatorial était de casser l'image des démocrates, selon le principe voltairien "Mentez,mentez, il en restera toujours quelque-chose", "Il faut mentir comme le diable, non pas timidement, non pas pour un temps, mais hardiment et toujours."(Voltaire, lettre à Thiriot du 21octobre 1736.) En vérité, la dictature togolaise est à bout de souffle et les pouvoirs français et européens n'en tiennent pas compte, et refusent toujours de s'engager réellement dans le soutien de la démocratie en Afrique. Ainsi, la loi du plus fort militairement continue. Le débat avec la salle permet de préciser les choses sur le rôle des diplomates actifs au Togo (Europe, USA, France, Allemagne, ONU) qui n'arrêtent pas les jeux de dupes, poussant vers des négociations pièges, en refusant de tenir compte de la réalité de la dictature. Sans doute, les diplomaties européennes et françaises sont des diplomaties aux objectifs obsolètes, qui ne sont pas encore sortie, plus de 20 ans après, des logiques de la guerre froide et du mépris pour les populations. La diplomatie française semble aussi incapable de sortir de l'influence de l'armée française en Afrique. Le débat revient aussi sur la nécessité de ne pas aller vers un accord électoral de l'opposition avant que les conditions d'organisation des élections ne soient fixées.
Je m'éclipse pour rejoindre juste à la fin une autre conférence que tient l'opposition djiboutienne, toujours sur le thème des législatives. Les 2 luttes se rejoignent. Dans les 2 pays, les diplomaties françaises et européennes brillent par l'absence de soutien à la démocratie. L'opposition djiboutienne est marquée par l'impossibilité historique de s'organiser à cause de la répression, plus forte qu'au Togo.

mardi 16 avril 2013

16 avril 2013, Aubervilliers, logements insalubres : alerte à la misère !

Ce colloque sur le logement insalubre « Habitat indigne dans la métropole parisienne : quelle mobilisation des territoires ? » était certainement organisé avant que ne survienne l'incendie du 4 rue Prévost et ses 3 morts, près de la porte de la Villette. Je me sens de plus en plus concerné comme habitant d'Aubervilliers. Bien qu'ayant été parfois à des débats sur le logement, je n'avais jamais assisté à des conférences-débats à un niveau aussi élevé, avec des professionnel-le-s et élu-e-s très compétent-e-s. A la première conférence de l'après-midi "la boîte à outils "opérationnels" ", les intervenant-e-s sont : Delphine Cervelle, Solidarités de la ville d'Aubervilliers, Christine Anmuth et Stéphane Fernandes, inspecteur-trice-s de salubrité, Carine Bensimon, Urbanis, Céline Brodovitch, SOREQA, Pascaline Tardivon, DRIHL, Bernard Loche, animateur. A la conférence de conclusion, se trouvent Evelyne Yonnet, adjointe mairie d'Aubervilliers chargé de l'Habitat et de la santé, Gilles Catoire, maire de Clichy-la-garenne, Jean-Yves Mano, adjoint au maire de Paris en charge du logement, Patrick Braouzec, président de Plaine Commune en charge de l'habitat, et Alain Régnier, délégué interministériel à l'Habitat et au Droit au Logement. Jacques Salvator conclut la journée.
Les questions de logement sont très techniques et je suis loin de tout comprendre. Il ressort surtout un cri d'alarme de la ville d'Aubervilliers et de Plaine Commune. C'est l'occasion de parler de la pauvreté de ma ville en fonction de données statistiques: avec 39% des ménages sous le seuil de pauvreté, 2e ville de France au taux de pauvreté le plus élevé après Roubaix. Selon l'Observatoire des inégalités, les villes comme Aubervilliers ou Saint-Denis "accueillent ceux qui n’ont plus les moyens de se loger à Paris et y travaillent". Il y a 5000 demandes de logement sociaux en attente pour 75000 habitant-e-s. Aubervilliers compte 42% de logement sociaux (et Plaine Commune 40%). Il y a de le sur-occupation, du logement insalubre, avec des problèmes de santé, et récemment la situation s'est beaucoup aggravée. Les services de la ville découvre de plus de personnes logeant dans des caves, des abris de jardins et mêmes des locaux à poubelles. Il y a de plus en plus d'arrêtés de périls et de plaintes. 
Médecins du Monde pose la question des bidonvilles dont les administrations ne tiennent pas compte, mais cette question reste en suspens. A la pause, la responsable m'explique qu'en cas d'épidémie dans un campement rrom la seule réponse de la préfecture est l'expulsion !
La question qui revient le plus souvent est celle des marchands de sommeil. Non seulement, ils exploitent des pauvres, mais ils se permettent aussi de profiter d'une législation très favorable à la propriété privée, bien ancrée dans la constitution, pour récupérer de l'argent public et parfois gagner avec leurs avocats des procès contre les collectivités locales. Alain Régnier, le délégué interministériel, explique qu'une loi sur le logement pourrait être débattue au parlement à l'automne. La ville d'Aubervilliers attend avec impatience cette loi, et d'autres aides de l'état pour rénover l'habitat. Une plus grande solidarité entre Paris et les banlieues pauvres est aussi attendue. La situation en arrive à un point où il faut faire des choix tels qu'entre priorité aux logements DALO et priorité à la lutte contre l'habitat insalubre. Cela pose des questions plus générales sur la société: nouveaux types de constructions, solidarité des territoires, relation ville-campagne, mixité sociales, et je rajoute redistribution des richesses. En attendant les idées de génie, les chiffres sont accablants: il faudrait construire 70 000 logements par en Ile-de-France, qui n'arrive à en construire que 35 000. Selon Patrick Braouzec, "On va à la catastrophe, en sifflotant", et il faudrait enfin se donner les moyens d'agir.

dimanche 14 avril 2013

14 avril 2013, le soleil enfin !

Enfin le soleil ! Si dieu existe, se venge-t-il du mariage pour tous-tes en rallongeant l'hiver au maximum? C'est encore la faute aux Femens! Encore une semaine de froid, et on avait un million de personne dans la rue contre la corruption de la classe politique. Encore deux semaines de froid, et on avait une vague de suicide équivalente à celle du passage à l'an 2000. Encore 3 semaines de froid, et on avait une révolution ! Parce que çà déprime collectivement quand le soleil ne se montre pas pendant des mois et que les factures de chauffage augmentent. Comme les français-es ont tendance à croire que tout dépend du roi-soleil de la République ! Heureusement, c'est fini, et le printemps arrive un 14 avril, alors que l'été était arrivé un 7 avril en 2010. Vraiment ! Hollande n'a pas de chance ! Je préfère une salle obscure de cinéma pour ne pas m'éblouir trop vite les yeux : "En compagnie d'Antonin Artaud" de Gérard Mordillat, un film qui me plaît énormément, programmé au festival 'Théâtres au cinéma'. Je passe par la Villette en revenant, où je tombe au milieu d'une foule venue profiter enfin d'un peu de chaleur.

samedi 13 avril 2013

13 avril 2013, Aubervilliers, Pole sup' en scène

Cette photo ne représente pas du tout l'état de la scène une minute avant et le spectacle extraordinaire qui a précèdé : 45 hommes et femmes bougeaient dans tous les sens (46 moins une blessée). Ce soir, je n'ai pas sorti l'appareil photo avant la dernière note des 3 spectacles de Pole sup' en scène. Du 8 au 13 avril 2013, les étudiant-e-s du Pôle Sup’93 s’affichaient au Théâtre de la Commune d’Aubervilliers. J'ai entendu Shao-Wei Chou « [Immersion] Sons, gestes et images », Marielle Le Monnier « Concert de musique polonaise (sauf Chopin !) », au piano avec une violoniste, et la chorale menée par Jeanne Dambreville «Répète un peu pour voir, 46 choristes a cappella mis en espace ». Cette chorale chante de la musique répétitive. La mise en scène est faite par Florence Lebailly. Je trouve cela vraiment bon, il se dégage une énergie et une bonne humeur contraire à l'hiver qui n'en finit pas. C'est très original et créatif dans le chant et la chorégraphie. Les 2 autres spectacles étaient aussi très bien. C'était aussi l'occasion d'en savoir plus sur les formations musicales pour les jeunes en Seine-Saint-Denis. Le nouveau conservatoire à Aubervilliers ouvrira en juin, mais pour l'instant l'état supprime 29,5% de sa subvention au Conservatoire à Rayonnement Régional d’Aubervilliers-La Courneuve dont les 22 emplois sont menacés.

mardi 9 avril 2013

9 avril 2013, Paris, Tunisie, révolution tunisienne en perspective(s)

La conférence 'La révolution tunisienne en perspective(s)' se passe dans un lieu que je ne connaissais pas encore, l'IREMMO, dans le Ve. Je mets du temps à arriver à cause d'un incident de métro et je ne peux me placer correctement pour les photos. La conférence est très intéressante. Il y a là Jocelyne Dakhlia, historienne anthropologue, de l'Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS), auteur de ‘Tunisie, Le pays sans bruit’, 2011, Pierre Puchot, reporter sur le Maghreb/Moyen-Orient à Médiapart, auteur de ‘Tunisie, une révolution arabe’, 2011, et ‘La Révolution Confisquée, Enquête sur la transition démocratique en Tunisie’,  2012, et Adnane Ben Youssef, secrétaire exécutif du parti Al Joumhouri pour la Fédération « France Nord » et ancien vice président FTCR (Fédération des Tunisiens pour une Citoyenneté des deux Rives). Le débat s'anime entre les conférenciers sur la question de la 'Justice transitionnelle': "Ce qui fait l’originalité de la Tunisie, c’est aussi la création d’un Ministère de la justice transitionnelle, ce qui est totalement inédit" selon Kora Andrieu. La loi se fait attendre. Cette justice transitionnelle ne sera peut-être pas possible dans les conditions actuelles, alors qu'une grande partie des cadres de l'ancien régime dictatorial se blanchissent discrètement. La justice et les réparations sont nécessaires mais la question est complexe, et le débat bloque sur certaines expressions comme 'mal nécessaire' qui expriment sans doute les difficultés à concevoir un équilibre entre justice, lutte contre l'impunité, changement de système, et continuité de l'Etat et de ses fonctions. Beaucoup de gens ont pris part à des activités liées à la dictature. Il existait une plage où les jeunes se baladaient en entendant les cris des torturé-e-s. 2 millions de personnes avaient une carte au parti au pouvoir. Les opposant-e-s démocrates étaient parfois rejeté-e-s parce que les gens avaient peur du danger qu'ils-elles véhiculaient avec la répression. La constitution écrite par l'assemblée constituante elle-aussi se fait attendre. Les partis politiques principaux négocient en dehors et ont peut-être transformé l'assemblée constituante en 'chambre d'enregistrement'. La gestion actuelle par le gouvernement est qualifiée de désastreuse, mais la dictature avait aussi empêché les partis issus de la révolution de 2011 d'avoir de l'expérience de gestion.

samedi 6 avril 2013

6 avril 2013, Paris, les Rroms premières victimes du mépris de la loi


A Bastille, est organisée une manifestation de soutien aux Rroms, contre les expulsions, organisées par Amnesty International. Quelques centaines de personnes se sont réunies dont assez peu de rroms. Il est parfois difficile de savoir si le gouvernement socialiste fait mieux que la droite, mais il y a un sujet sur lequel il n'y a plus aucun doute, c'est le traitement des Rroms par le Ministère et le Ministre de l'intérieur : discrimination, racisme, mépris de la loi. La justice vient d'être obligée de rappeler à l'ordre un préfet: "Un juge a condamné le préfet du Rhône à proposer un hébergement à des familles Roms qu’il venait d’expulser d’un terrain." Selon ce jugement, à partir de ce 4 avril, les expulsions de campements pourront être contestées devant les tribunaux si elles ne sont pas effectuées avec solution alternative. C'est vrai que le scandale est inadmissible, il se base sur la certitude pour l'Etat que les rroms sont dans une catégorie de population qui n'arrive pas à se défendre. C'est bien là notre époque: les intimidations, le mépris des gens et des lois sont admis de la part de ceux-celles qui s'estiment les plus fort-e-s, et la justice galère derrière avec toujours un temps de retard. Il y a des lois, des moyens, de l'argent, une multitude de personnes qui sont en charge de procédure et de taches diverses, mais des seuils sont inaccessibles pour les plus pauvres ou les plus faibles qui ne peuvent se défendre. Souvent, les forts et les riches en profitent, et savent embrouiller les situations pour les rendre inextricables ou transformer ce qui était un droit selon des lois, en cadeau issus de processus humanitaires subjectifs et aléatoires.