vendredi 27 janvier 2017

27 janvier, Aubervilliers : Qu'est-ce qu'on attend ?

« Qu'est-ce qu'on attend pour être heureux ? » dit la chanson. Le dernier film de Marie-Monique Robin, c'est « Qu'est-ce qu'on attend ?» pour ... être en transition, en transition comme le village d'Ungersheim. Les symptômes se déplacent dit le psy, et on a beau vouloir être heureux, il y a toujours quelque chose qui cloche quelque part. Mais en Alsace, il existe tout de même un village extraordinaire.  
Le collectif climat d'Aubervilliers organise cette projection-débat au cinéma le Studio à laquelle participe la réalisatrice. Selon Bernard, qui présente le film, « il y a souvent un réflexe d'aller vers l'Etat et les collectivités, alors qu'il est possible pour les gens et la société civile de se mobiliser pour interpeler et devenir une force de proposition.»
Le film présente la transition écologique, dans le bâtiment, l'énergie, les déchets, l'agriculture, l'alimentation, telle quelle a été mise en œuvre à Ungersheim, très inspiré par son maire, Jean-Claude Mensch. Celui-ci a patiemment réussi, pendant 20 ans, avec un groupe d'une cinquantaine de personnes motivées, à entraîner dans « un cercle vertueux » le reste du village de 2200 habitants. On sent une grande convivialité dans le village, avec un peu de fierté à participer à la construction d'un modèle.
Pendant le débat, Marie-Monique Robin propose de parler des « lanceurs d'avenir » comme on parle des lanceurs d'alerte. Elle évoque une « société post-croissance », le partage du travail, la décarbonation de l'alimentation, l'isolation thermique, l'exode urbain, et plus globalement de changement de paradigme face à une crise sociale, économique et écologique.
Elle observe la prise de conscience sur le climat, regrette que «la gauche soit encore très productiviste » et espère que les élections en France, puissent enfin faire avancer les choses, s'il y avait une alliance... Le documentaire tombe au bon moment pour parler des choses en sortant des simplifications liées à un ancien schéma de pensée basé sur une 'valeur travail obsessionnelle' et un mythe de croissance illimitée.
Régis Marzin, article écrit et publié le 1er mars 2017

jeudi 19 janvier 2017

19 janvier 2017, Aubervilliers, le Campus Condorcet en 2019 !

C'est en juin 2019 que doit s'ouvrir le Campus Condorcet, dont près des trois quarts seront à Aubervilliers près du Métro Front populaire, et dont le quatrième quart sera Porte de la Chapelle à Paris. Un dernier bout, la MSH existe déjà à Saint-Denis sur le site du Front populaire. Le campus en sciences humaines et sociales abritera 18 ou 19000 étudiant-e-s et 3500 chercheur-se-s. Il sera l'un des plus grand d'Europe. Le site regroupera 4000 étudiant-e- au niveau licence, 4100 au niveau master, 4800 doctorant-e-s, et 4200 enseignant-e-s chercheur-se-s.
Les responsables sont invités par la Mairie d'Aubervilliers pour présenter le Campus. Sont présents, aux côtés de Silvère Rozenberg, conseiller municipal déléguéà l'Urbanisme, Jean-Marc Bonnisseau et David Bérinque, respectivement Président et Directeur général du Campus Condorcet.
Selon eux, les recherches en sciences humaines et sociales doivent servir à aider à éviter des dérives liées à l'ignorance, aider à la décision, par exemple dans le domaine des migrations. L'idée est partie en 2007, du projet de déplacement de l'EHESS, et, il y avait pénurie d'espace pour les chercheur en intra muros.
Aubervilliers a donné le foncier. Le premier ministre a confirmé le projet en 2015. La région Ile-de-France a la maîtrise d'ouvrage pour certains bâtiments, mais l'essentiel sera géré en Partenariat Public Privé (PPP). Le contrat PPP, à Aubervilliers seulement, a été décidé en 2012. L'Etat paiera pendant 25 ans, un loyer à des sociétés privées. Les contrats ont été signés en 2016 avec, entre autres, Vinci pour la construction et Engie Cofely pour l'exploitation.
Les architectes principaux seront Elizabeth et Christian de Portzamparc, en particulier pour la bibliothèque de 14 millions d'ouvrages. Le campus abritera en plus des universités 1, 8 et 13, le CNRS, l'École des Hautes Études en Sciences Sociales (EHESS), l'Institut National d’Études Démographiques (INED), l'École Pratique des Hautes Études, l'École Nationale des Chartes. Il participera à la ville, sera ouvert sur la ville, sans aucune clôture. Plusieurs bâtiments seront ouverts au public en journée, en particulier le rez-de-chaussée de la bibliothèque. Un centre de colloques attirera du monde. Quelques bâtiments seront très hauts, par exemple la Cité universitaire de 17 étages, en respectant 40% d'espace au sol libres, dont 20% végétalisés. Le tramway T8 pourrait un jour être prolongé depuis Porte de Paris. Plaine Commune investit 4 millions dans l'aménagement des rues, en zone 30. Beaucoup de place sera accordée aux piétons et aux vélos.
D'octobre à décembre 2016, des rencontres citoyennes ont permis de définir 24 engagements négociés entre mairie et campus, dont des plantations d'arbres ou une priorité dans l'accès aux femmes à l'espace public. Abderahim Hafidi, conseiller municipal chargé de la Coopération internationale, de la Vie universitaire, et du Campus Condorcet Paris-Aubervilliers souligne la dimension nationale et mondiale du pôle universitaire.
La salle demande ensuite des précisions. Quelques personnes ont des inquiétudes concernant le très haut bâtiment et d'autres concernant le lien entre le campus et la ville. Est-ce que les routes et chemins à pied et en vélo vont être amélioré-e-s? La question se pose à peine car la campus arrivera en même temps que le métro. Cependant, l'aménagement du canal est encore à travailler, il est question de nouvelles passerelles. Le logement autour du campus créera aussi du lien. Catherine, chercheuse engagée, reconnaît que les professeurs auront au début peur de venir. Il reste aussi une prairie dont l'usage n'a pas encore été défini. Une personne demande des garanties pour des emplois en local. Une autre semble en vouloir aux mécaniciens en plein air. On lui répond qu'il y a des amendes. Un élu répond sur l'attractivité de la ville mais se 'trompe' selon mes critères dans ses références à des lieux, prouvant qu'il y a encore du travail à faire là-aussi.
Le débat est un peu frileux, clivé, sans enthousiasme, comme si plusieurs mondes se parlaient pour la première fois, le savoir, la parole facile, et l'argent d'un côté, des habitants peu habitués aux grands projets et aux grands discours, de l'autre, comme si une nouvelle réalité décalée s'inscrivait dans un espace par surprise. Qui est le plus intimidé ? Les cités de banlieue ne sont pas évoquées explicitement. Les élu-e-s locaux font leur maximum pour faire le trait d'union.
Quant à moi, en tant qu'habitant-chercheur en sciences politiques, en plus d'être journaliste-blogueur, je suis pour l'instant enthousiaste ! Au lieu que j'aille à l'Ehess, l'Ehess va venir près de chez moi, à 1 minute en métro de ma porte, merveilleux ! Une grande bibliothèque sera juste à côté. Il y aura des conférences. Il y aura des jeunes dans la ville, plus de vie, de débats intellectuels. Évidemment, on ne pas prévoir exactement comment cela va tourner, mais cela sera très intéressant d'observer les choses et sans doutes les mélanges de genres à venir. A suivre...
Régis Marzin, article écrit et publié le 2 mars 2017

19 janvier 2017, Paris, Centre Pompidou : Magritte

19 janvier 2017, exposition « Magritte. La trahison des images » au centre Pompidou su 21 septembre 2016 au 23 janvier 2017. Les peintures me semblent avoir un peu vieilli, peut-être parce qu'elles sont souvent très conceptuelles . Elles sont déjà assez célèbres, très adaptées au monde moderne et à ses multiples images publicitaires. Une fois un concept connu, il manque par la suite de surprise. C'est une statue qui me surprend le plus finalement, « La folie des grandeurs » de 1967.
Quelques temps auparavant, j'étais allé découvrir avec un ami, le Musée Picasso, à quelques pas de là, à la fin de l'exposition « Picasso-Giacometti, Dialogue entre deux maîtres ». J'y avais trouvé un peu plus de mystère et de richesse de style... Pour le souvenir.
Régis Marzin, post-souvenir écrit et publié le 1er mars 2017

lundi 16 janvier 2017

16 janvier 2016, Aubervilliers, Musulmans « ordinaires » d’Europe

Nilüfer Göle, sociologue et directrice d’études à l'EHESS,  auteure de "Musulmans au quotidien, une enquête européenne sur les controverses autour de l’islam", La Découverte, Paris, 2015, présente la conférence "Musulmans « ordinaires » d’Europe", organisée par le Campus Condorcet, au Lycée le Corbusier à Aubervilliers.
Nilüfer Göle a voyagé en Europe pour étudier les "controverses", en multipliant des échanges sur des thèmes comme le voile, les mosquées, ou l'alimentation halal.
Elle affirme sa volonté de sortir de la société du spectacle (Guy Debord), parce que le spectacle "empêche de se lier", de "soustraire la vie publique de la vie médiatique", parce que les gens ne se voient maintenant qu'au travers des media. Elle insiste sur l'idée de "surmonter le rejet et se familiariser avec l'autre, grâce au "potentiel créatif dans l'espace public", illustré par une présentation d’œuvres  artistiques questionnantes. 
Au début du débat, le politologue et élu local d'Aubervilliers, Abderrahim Hafidi, s'éloignant de la culture du consensus albertivilarienne, exprime fortement sa déception, parce que, pour lui, il faut se replacer dans "une histoire complexe de Napoléon à la guerre en Irak".
Une autre personne du public remarque que les technologies actuelles réduisent les distances entre les lieux géographiques. Nilüfer Göle voit plutôt les technologies en question, internet, comme un frein à la rencontre réelle avec une "familiarisation", entre les uns et les autres. Elle estime que "le rôle des intellectuels doit changer" et conclut sur son rôle de "traductrice".
Régis Marzin, 16.1.17, 22h45 

lundi 9 janvier 2017

9 janvier 2017, Aubervilliers : débat « le mal logement »

Le débat "le mal logement", avec comme principale intervenante la Ministre du logement, Emmanuelle Cosse, a lieu ce lundi à Aubervilliers au café culturel ‘le Grand bouillon’. Il a été organisé par Elisabeth Guigou, députée d’Aubervilliers et Evelyne Yonnet, sénatrice. Intervient également, Nancy Bouché, ancienne inspectrice générale de l’Equipement, actuellement en retraite mais toujours très active, qui a été Présidente du Pole national de lutte contre l'habitat indigne de 2002 à 2009.
Le débat doit parler des thèmes « habitat insalubre, marchands de sommeil, logement social », et en introduction, Elisabeth Guigou insiste sur l’habitat indigne et les marchands de sommeil.
Evelyne Yonnet indique que 10% du parc locatif privé en Seine-St-Denis est de l’habitat indigne. Aubervilliers a la particularité d’avoir beaucoup de logement d’une ou 2 pièces et de « propriétaires occupants impécunieux », au point que « les plus pauvres sont les propriétaires privés ». Elle rappelle les projets de rénovation urbaine des quartiers 4 chemins-Villette et Landy, et évoque des Plans de sauvegarde de copropriétés endettées. Le temps d’attente pour obtenir un logement social est de 8 ans. Elle signale la présence d’une Pension de famille ou Maison-relais.
Au Sénat, une loi présentée par Évelyne Yonnet et Jean-Pierre Sueur, est en préparation sur l’habitat indigne et les marchands de sommeil, en lien avec Emmanuelle Cosse. La sénatrice parle des lits superposés, des appartements avec entre 10 et 15 adultes et des enfants en plus. Quatre propriétaires ont été condamnés et un autre est proche de l’être. Paris a éradiqué son logement indigne mais cela a repoussé les « propriétaires malfaisants » vers la banlieue proche.
Emmanuelle Cosse était vice-présidente de la Région Ile-de-France chargée du logement avant d’être ministre. Elle constate que le ‘droit de propriété est très protégé’. Les éléments de langages sont nuancés : elle différencie les « propriétaires négligents » des marchands de sommeil, en constatant que « tous font de l’argent » et que la question est aussi « d’éradiquer le commerce de l’insalubre ». La loi Alur de 2014 prévoyait déjà une « police de l’insalubrité », avec des sanctions contre les marchands de sommeil, des blocages au niveau de la CAF, des « permis de louer », des « permis de division ». En ce moment, il y a des « divisions pavillonnaires avec une famille par pièce ». Concernant le parcours législatif de la loi, elle attend les réponses de la Cour constitutionnelle.
La ministre constate l’absence de relogement des DALOs (Droit au logement opposable) dans certains départements, dont les Hauts-de-Seine, 28% seulement, le Var, le Vaucluse, qui ne respectent pas la Loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU), alors que Paris et le 93 relogent 90%. Elle redoute les projets du candidat Fillon. Il y a des problèmes dans 100 communes sur 3600. Elle « n’insiste pas sur les effectifs du Tribunal de Bobigny ».
Nancy Bouché regrette que les « sans-papiers soient les premières victimes », puis, se plaint de l’absence d’un site internet qui centraliserait toutes les informations sur l’insalubrité. Elle affirme que « contre les marchands de sommeil, le plus efficace, ce sont les travaux d’office », et qu’il faut « la police d’abord, la discussion après, et non pas l’inverse », comme cela semble être le cas très souvent.
Pendant le débat, le Maire de Pantin, Bertrand Kern, regrette « un droit de propriété trop fort, qui bloque les projets des mairies contre les marchands de sommeil, qui, eux, multiplient les procédures pour gagner plusieurs années, avec des loyers au noir ».
Emmanuelle Cosse indique que, grâce à la loi SRU, avec les 25% de logements sociaux, il y a un enjeu de 700 000 logements. Elle signale un besoin qui grossit de logement pour les retraités, des difficultés dans les successions en indivision, le manque de magistrats et d’officiers de police judiciaire associés. Elle souhaite des brigades spécialisés. Elle regrette, citant l’arrivée de la Ligne 12 à Aubervilliers, le « phénomène d’éviction des populations les moins favorisées » (sous-entendu « par un phénomène de « gentrification » »).
En conclusion, Elisabeth Guigou propose de commencer par rencontrer en délégation le président du Tribunal de Bobigny.
Le débat montre l’importance d’Aubervilliers, ville à la fois pauvre et proche de Paris, dans les débats législatifs. Plusieurs personnes félicitent Evelyne Yonnet pour ses efforts sur le terrain et au sénat.
Régis Marzin

Compte-rendu écrit et publié le 11 janvier 2017

dimanche 8 janvier 2017

7 janvier 2017, Nancy, Gabon : en attendant le parlement européen…

La conférence s’intitule "De Nairobi à Strasbourg : quelles perspectives et quels acteurs (nationaux et internationaux) pour la paix et la démocratie au Gabon?". Elle a lieu à Vandœuvre-lès-Nancy, ville universitaire de 35000 habitants accolée à Nancy, entre Paris et Strasbourg, pas très loin du Parlement européen. Dans quelques jours, au Parlement européen, aura lieu, enfin !, le débat et le vote d’une résolution sur le coup d’Etat électoral dont a été témoin la Mission d’Observation européenne (MOE-Ue) dirigée et contrôlée par des parlementaires.
Les intervenant-e-s sont, de gauche à droite, Scheena Donia, du bureau du Conseil des Gabonais de la Résistance (CGR), El Ali Ibrahim, activiste à Paris, Laurence Ndong, auteure du livre « Gabon, pourquoi j’accuse », Séraphin Moundounga ex ministre de la Justice gabonais, qui a démissionné du gouvernement le 5 septembre 2016, et moi, journaliste-chercheur auteur d’un bilan 2016 des élections en Afrique.
La conférence a été organisée par Laurence Ndong. Le conteur Chyc Polhit l’anime. Deux musicien-ne-s introduisent l’après-midi par un court spectacle. La mairie de Vandœuvre-lès-Nancy accueille chaleureusement l’événement, et, est représentée par le maire-adjoint, Jean-Paul Bernard.
Je commence par le bilan de l’année 2016, pic électoral avec 14 présidentielles, dont 7 en dictatures, et 10 législatives, contextualisé dans l’historique de la démocratisation du continent africain depuis 1990. Le coup d’Etat électoral gabonais a eu lieu après les coups d’Etats électoraux du premier semestre au Congo Brazzaville, au Tchad et à Djibouti.
En 2017, trois dictatures changent d’état et passent en statut ‘instable’ : la RDC arrive dans une vraie transition vers la démocratie, la Gambie va vers une chute possible de son dictateur ubuesque, la Gabon reste en crise électorale de haute intensité. Le Tchad, en banqueroute, avance d’une autre manière, vers l’inconnu. L’année 2017, sera donc une année de gestion des crises électorales, alors que 2016 avait d’abord montré l’indifférence et l’hypocrisie de la communauté internationale et africaine face aux coups de forces des dictateurs.
L’enjeu augmente en Afrique centrale, dans laquelle, l’absence de dates pour les législatives au Congo Brazzaville, au Tchad, et au Gabon, est la preuve d’une crise électorale régionale dont la logique dépasse celle de chaque crise nationale. Cette crise régionale met la communauté internationale et africaine devant ses responsabilités : prévenir vaudrait mieux que d’agir a posteriori. Le levier d’action est connu : exiger la qualité technique des processus électoraux par un une pression politique ferme.
Puisque l’Union africaine en reste toujours à soutenir les dictateurs, il est recommandé de ne pas appliquer les principes de complémentarité et de subsidiarité entre Onu, Ue et Ua, au profit des dictateurs. Le coup d’Etat électoral au Gabon met l’accent sur la relation Ue-Ua à réformer à plus long terme. La Mission d’observation européenne au Gabon a mis en évidence que les missions d’observations européennes étaient instrumentalisées par les dictatures, alors que les missions de l’Ua ne servent pour l’instant à rien si ce n’est à soutenir les régimes. La politique européenne de soutien à la démocratie est en jeu, y compris au niveau de l’Accord de Cotonou.
Le revirement de la communauté internationale et africaine au Gabon, face à Ali Bongo et à Idriss Déby venu le soutenir, s’est en grande partie fait, quand, pendant l’Assemblée générale de l’Onu, les acteurs influents au Gabon ont mis la priorité sur la RDC en enlevant la pression sur la Cour constitutionnelle gabonaise. Aujourd’hui, l’influence démocratique en RDC a tendance à jouer négativement au Gabon, il serait sans doute possible d’agir à ce niveau.
Scheena Donia présente le Conseil des Gabonais de la Résistance (CGR) qui les derniers mois a mené la lutte sur Paris, en coordonnant les activités de la diaspora. Elle insiste sur la non-violence et sur la multiplicité des actions possibles. En ce moment, celle-ci se mobilise autour de la résolution du parlement européen et de la Coupe d’Afrique des nations (Can) qui va commencer au Gabon. Une manifestation aura lieu à Strasbourg le mercredi 18 janvier, la veille du débat au parlement le jeudi 19. Le CGR invite les diasporas des autres pays à se joindre à cette manifestation. Au Gabon, la lutte va s’intensifier pendant la période des matchs de foots.
El Ali Ibrahim parle lui aussi des méthodes d’actions. Il évoque à la fois Gene Sharp, Gandhi et Mao Tsé Dong trouvant des actions stratégiques alternatives. Au Gabon, cela revient par exemple à dialoguer avec les militaires, comme Sams’K le Jah, du Balai citoyen au Burkina parlait constamment aux policiers, qui, ensuite, n’ont pas tiré sur les manifestants pendant la révolution. Il souligne la culture légaliste de Jean Ping, issu du milieu diplomatique, et pense qu’Ali Bongo craint la CPI en cas de violence face à une manifestation dans la rue. Il signale que pour la CAN, Ali Bongo voudrait remplir les stades d’enfants emmené-e-s des écoles. Il craint que pour se bouger, « chacun attende quelque chose de l’autre ».
Laurence Ndong explique ce qui s’est passé à Nairobi, quand les parlementaires européens ont voulu mettre dans une résolution sur le Gabon l’exigence d’un recomptage. Il y avait peu d’espoir que cela passe. Elle présente ensuite la ‘gouvernance au Gabon’ : « la kleptocratie, le clientélisme, le népotisme, la déperdition des valeurs, la paupérisation de la population, l’éducation négligée, avec 18,5% de bacheliers en 2015 et 14,7% en 2016 ». Elle cite le chanteur camerounais Valséro parlant de « régime de conservation du pouvoir, d’immobilisme, de zombification, d’endoctrinement » quand le régime veut faire croire à la « population qu’elle ne peut rien faire ». Elle remarque que les églises contribuent aussi à rendre des gens passifs.
Séraphin Moundounga revient sur le thème de la conférence « quelles perspectives et quels acteurs (nationaux et internationaux) », en soulignant, comme il l’avait fait le 16 décembre à Paris, que « l’action internationale se déroule en appui des actions des gabonais », et « en fonction des évolutions ». Il rappelle avoir été victime de plusieurs tentatives d'assassinat début septembre, qui l’ont poussé à l’exil. Il explique son parcours, en évoquant les prisons et les crimes rituels. Il signale que des réformes, dont « la prescription après la majorité pour les viols », ont été bloquées. Surtout, il indique que « le code pénal protège les militaires des crimes », au travers d’une procédure inapplicable basée sur les 2 uniques « magistrats du 7e groupe », « sans différence entre siège et parquet ». Cette procédure permettaient que les crimes de la présidentielle de 2016 soient possibles.
Il précise les faits à ‘Nairobi’. Il y avait 77 parlementaires européens et 77 des ACP. Les européens posaient deux questions : celle du recomptage et celle d’une mission d’enquête internationale. La réponse au deux propositions a été négative. Les députés gabonais ont fait le maximum pour l’empêcher. Les parlementaires européens pourraient maintenant rédiger une résolution demandant des sanctions, sans doute ciblées comme en RDC, à l’exécutif européen et au Conseil européen. Cela suivrait logiquement les rapports des missions d’observation, celui très dur de l’Ue, publié le 12 décembre (rapport pdf 66p), et même celui de l’Ua, pour lequel il n’y a pas eu de communication officielle. Il rappelle également la Responsabilité de protéger de l’Onu.
Il conclut sur le « droit de désobéir », par exemple si « les enfants sont envoyés à la CAN », puis par une citation d’Etienne de la Boëtie issue du ‘Discours de la servitude volontaire’ de 1574 : « … tous ces peuples qui se laissent promptement allécher à la servitude, pour la moindre douceur qu'on leur fait goûter. C'est chose merveilleuse qu'ils se laissent aller si promptement, pour peu qu'on les chatouille. Le théâtre, les jeux, les farces, les spectacles, les gladiateurs, les bêtes curieuses, les médailles, les tableaux et autres drogues de cette espèce étaient pour les peuples anciens les appâts de la servitude, le prix de leur liberté ravie, les outils de la tyrannie. Ce moyen, cette pratique, ces allèchements étaient ceux qu'employaient les anciens tyrans pour endormir leurs sujets sous le joug. » Je traduis : Ali Bongo pense y arriver à l’ancienne, avec un vieux logiciel périmé.
Le débat est réduit au minimum faute de temps. Un activiste revient sur les modes d’actions, sur un mélange possible des méthodes. Un autre présente les « marches numériques » qui ont déjà du succès. Séraphin Moundounga a le mot de la fin. Il invite à « solliciter le soutien européen » en argumentant sur la « paix assise sur la démocratie » en Afrique.
Régis Marzin
Article compte-rendu écrit et publié le 8.1.17