Ce
samedi 27 mai, à l’Embarcadère, le service de la Vie associative et des
Relations internationales d’Aubervilliers organise une journée sur l’esclavage.
En arrivant, dans le hall, au milieu d’autres expositions, je discute de Ouidah,
et de la mémoire de l’esclavage au Bénin, comme je connais un
peu le Bénin.
Une première conférence a pour thème ‘L'esclavage dans
le monde aujourd'hui, l'exemple de la Mauritanie’. Le chercheur Daouda Ndiaye
reprend la problématique à partir de la structure de la société Soninké,
organisée en classes, avec une noblesse de chefs de villages et de savants, des
castes de métiers, et des familles dépendantes des familles de noblesses. L’esclavage
dans lequel les maîtres avaient tous les droits, a été supprimé en 1970, mais
la dépendance est restée après cette étape d’affranchissement. La loi n’est pas
bien appliquée. Dans le lien traditionnel, l’entraide est obligatoire, les
familles restent proches. Waly Diawara, de l’Association Ensemble pour l'Espoir
et le Développement (EED) complète les explications. Dans certains cas, les
anciens esclaves et maîtres ne se parlent plus. Il n’y a pas de mariages entre
castes. Il y a une division ethnique qui s’ajoute. L’Etat a créé une agence
pour lutter contre les séquelles, Tadamoun, qui s’attaque à la pauvreté. Daouda
Ndiaye me précise ensuite, qu’il y a des élections locales mais que l’ordre
ancien se perpétue, quand les élus sont ‘nobles’ et très rarement des familles
d’esclaves. Selon lui, les mentalités n’évoluent pas assez, et il y a un
problème de société. Comme j’insiste un peu sur l’absence
de démocratie en Mauritanie, il reconnaît que la citoyenneté est aussi mal
comprise au niveau national.
Après un court-métrage, et un film de bilan historique
parrainé par l’Unesco,
le second débat rassemble Marcel Dorigny, historien spécialise de l’esclavage, Huguette Marcelin, originaire d’Haïti, Dominique Sopo de SOS-Racisme, et l’animateur Alphonse Karim, du cinéma le Studio.
Marcel Dorigny est passionné. Il démarre sur la révolte de St-Domingue entre
1891 et 1803 quand 500 000 esclaves ont pris les armes. Il n’y avait alors
que 600 000 esclaves aux USA. Les français ont accordé l’abolition pour
éviter une conquête anglaise. Ce fût la seule insurrection victorieuse. Cela me
rappelle le film « Queimada », ce chef d’œuvre,
une fiction dans laquelle on devine que des esclaves libérés transformés en
ouvrier agricoles pouvaient ensuite rapporter autant d’argent aux propriétaires
et aux investisseurs dans le sucre. En Amérique du sud, l’esclavage est resté
après les indépendances. Lors du débat avec la salle, l’historien précise que l’esclavage
sous l’empire romain n’était pas « racialisé », alors que « l’esclavage
colonial est racialisé ». Il estime à 13 millions le nombre de personnes
transportés dans la traite atlantique, en s’appuyant sur des archives des sociétés
d’assurances à Londres, en évaluant à 5 ou 6 fois plus le nombre de morts
autour du commerce avant les départs, soit 70 millions de morts. Dans son « Atlas
des esclavages », bourré de cartes et de graphique, se remarque
un graphique des quantités de personnes annuellement transportées sur plusieurs
siècles, on remarque les guerres en Europe qui limite le commerce. Il n’y a pas
d’archives pour la traite « arabo-musulmane » qui a déporté entre 8
et 13 millions de personnes.
Huguette Marcelin précise
quelques faits sur Haïti et remercie Christiane Taubira, dont la
loi de 2001 a permis la reconnaissance de l’esclavage en crime contre
l'humanité. Dominique Sopo intervient sur le racisme. Selon
lui, pour justifier l’utilisation, on a construit une théorie raciale. Il
constate qu’en 2017, lors de la cérémonie du 10 mai, il y avait « des
blancs dans la tribune et des noirs en bas ». Il regrette que Jean-Marc
Ayrault ait été nommé à la tête d’une Fondation sur l’esclavage
à la place d’une personne concernée.
Carlos
Semedo, le directeur de la Vie associative et des Relations internationale
conclut en souhaitant aller plus loin. Il propose de renouveler ce rendez-vous
tous les ans.
Régis Marzin
Article écrit et publié le 6 juin 2017
Régis Marzin
Article écrit et publié le 6 juin 2017
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