Paris XIe, Espace Hermès, vendredi 16 décembre, 19h30, une conférence-débat
a été organisée par des membres de la diaspora gabonaise sur « la crise
post-électorale gabonaise » pour présenter « témoignages, expériences
et perspectives ». Les intervenants sont le syndicaliste Jean Rémy
Yama, Alfred Nguia Banda, et l’ancien ministre Séraphin Moundounga.
Jean Remy Yama est le président de la Dynamique
Unitaire, le principal syndicat des fonctionnaires. Il a passé 89
jours en prison entre le 8 juillet et le 6 octobre pour aucune raison
valable si ce n’est son combat contre la dictature.
Alfred Nguia Banda, ancien directeur général de la Société
gabonaise d’entreposage de produits pétroliers (SGEPP), a quitté le Parti démocratique gabonais
( PDG) d’Ali Bongo pour créer le 30 avril 2016 son parti, le
Rassemblement républicain et socialiste. Passé dans l’opposition, le 23
septembre, il a
dû fuir le Gabon précipitamment pour ne pas être arrêté.
Séraphin
Moundounga a été ministre de la Justice et second vice-Premier
ministre de 2014 à 2016. Le 5 septembre 2016, il a démissionné du gouvernement afin
de protester contre l’absence de recomptage des votes du scrutin du 27 août. Il
affirme avoir été victime
d’une tentative d'assassinat le 7 septembre, qui l’a poussé à l’exil.
Les 3 intervenants ont donc été victimes de la
répression autour du second
coup d’Etat électoral d’Ali Bongo. Jean Rémy Yama, est en liberté
provisoire, toujours accusé de « délit
d'attroupement non armé ayant troublé l'ordre et la tranquillité publics »,
il a pu quitter le Gabon pour « raison de santé ». Les deux autres
sont maintenant en exil politique. Séraphin Moundounga précisera ensuite qu’il ne
pouvait pas empêcher l’arrestation de son voisin Jean Rémy Yama
en raison de la « séparation des pouvoirs ».
Jean Remy Yama explique qu’il a créé le mouvement les Témoins actifs en juin 2016 pour surveiller le processus électoral,
sans craindre la répression car « on ne peut pas mener un combat si on
peur de la prison ou de la mort ». Quatre leaders de Dynamique
Unitaire ont été emprisonnés. Il insiste sur la non-violence, et termine en
demandant à la diaspora de ne pas faiblir.
Alfred Nguia Banda raconte sa fuite, pendant laquelle il a été blessé
au pied d’une double fracture, et revient sur d’autres exemples de la
répression. Il cite 3 noms de colonels de l’armée. Il affirme que la répression
continue. Il juge que le Haut-Ogooué est pris en otage.
Séraphin Moundounga développe une analyse sur l’Accord de Cotonou qui
lie le Gabon et l’Union européenne (Ue). Il explique la logique des articles 8,
9 et 96 et le processus qui démarre en cas d’ouverture d’une consultation. Un
document sur une réunion à Libreville sur ce sujet vient de circuler sur les
réseaux sociaux mais ce document après vérification après la conférence ne
paraît pas fiable. Le ministre exilé demande une enquête internationale
indépendante sur les violations des droits humains, des réformes pour une
justice plus indépendante, une Commission électorale (Cenap) et une Cour
constitutionnelle indépendante, des réformes pour les élections futures.
Il approuve le fait que le débat sur les législatives ait
été rejeté. Concernant la présidentielle, il propose de revoter dans le
Haut-Ogooué et dans le 2e arrondissement de Libreville, ou de rayer
les résultats de ces 2 zones, ce qui dans les deux cas confirmera la victoire
de Jean Ping, ou, troisième option, une transition allant vers une élection
anticipée sous protection internationale. Il invite à continuer les démarches
vers l’Ue, l’Onu, les différents pays européens et africains.
Le débat avec la salle porte surtout sur l’Union européenne et l’accord
de Cotonou. Il est question des difficultés dans une procédure et des sanctions
selon l’Accord de Cotonou. Le Gabon pourrait supporter des sanctions européennes
mieux que le Burundi. Séraphin Moundounga a aussi étudié l’échec des sanctions
au Togo et les sanctions ciblées actuellement
en RDC.
L’ex-ministre de la Justice précise qu’il ne s’agit pas d’attendre
la procédure européenne, qui viendrait en appui au principal, les actions des
gabonais. Il évoque
le livre « De
la dictature à la démocratie » de Gene Sharp (1993), très
lu au Gabon, parce qu’il décrit des méthodes
d’action non-violente. Concernant l’Onu, Séraphin Moundounga souhaite aussi que l’on
parle de sa Responsabilité de protéger.
Régis Marzin,
Compte-rendu écrit
et publié le 30.12.16
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