En juillet 2013, je faisais mes débuts dans le cinéma... par une figuration dans un film tourné par un ami, à Pantin, avec un très petit budget de manière surtout bénévole, et, en cette journée d'anniversaire du massacre des algériens par De Gaule et Papon, je me rends à pied jusqu'au cinéma où a lieu "l'avant-première mondiale", à la Courneuve, au Cinéma l'Etoile. En arrivant, je croise le campement des Rroms du Samaritain expulsé-e-s fin août, dans le parc qui jouxte la mairie, pendant un rassemblement de soutien. Comme je me sens proche du film, à cause de ma proximité amicale et géographique, je doute bêtement du résultat et je me demande si je ne vais pas manquer de recul.
Le film de Jerôme Polidor, projeté pendant le Festival les Pépites du cinéma, s'appelle maintenant "Merci les jeunes". Il raconte l'histoire d'une association de quartier, en banlieue parisienne - sans doute -, qui réalise des émissions de télé. L'équipe se divise en raison de la censure des élus qui subventionnent. Certains veulent en vivre et accepte de se plier à ces exigences pour faire du spectacle racoleur, d'autres penchent vers un journalisme sans tabou.
Le peu de moyen de la production ne se sent absolument pas au niveau technique, bravo. Le scénario est original et riche : l'idée d'avoir des films dans le film permet de faire des allers-retours entre une réalité et la vision médiatisée de cette réalité. Quelques clichés sur la banlieue sont ainsi abordés de manière habile, avec un peu de recul et d'humour: une peur des musulmans, le travail et le chômage, la police,... Le scénario, parti de l'idée du réalisateur a été enrichi par un an d'atelier avec des 'jeunes' organisé par l'association 'Les engraineurs'. Le ton est juste, entre obsessions adolescentes fleuries et impressions
de références discrètes à Guy Debord ou à Jean-Luc Godard. Le récit part des émeutes de 2005 et montre des politiciens et des collectivités publiques qui cherchent à maîtriser la situation en contrôlant l'information.
Pendant le débat, la salle est enthousiaste; toutes les réactions sont positives. Les questions reviennent sur le cinéma et les associations. Jerôme Polidor reconnaît qu'il y a souvent une autocensure pour entrer dans les cases des appels d'offres. Lui voulait faire un film qui ne parlent pas des voyous et des stars mais parlent de tous les autres. Une jeune femme dénonce alors "l'instrumentalisation des jeunes" qui servent à des "projets d'adultes" dans le sport ou la culture, avec l'idée aussi de les "faire taire". Le réalisateur du documentaire Noir Coton signale aussi la "bonne conscience" qui s'obtient facilement dans l'arrosage culturel et financier.
'Merci les jeunes' sort le 4 novembre dans quelques rares salles, entre 5 et 10, grâce à une distribution "pas indépendante mais autonome des indépendants". Espérons que l'engagement de certains programmateur-trice-s et le bouche à oreille lui permettront d'obtenir le succès qu'il mérite. Une seconde avant-première, aura lieu le mardi 3 novembre à 20h, au Cinéma La Clef, 34 Rue Daubenton à Paris.
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