mardi 18 octobre 2016

16 octobre 2016, Vincennes, Cabaret d’urgence

Le procès de Loïc de la Compagnie Jolie Môme aura lieu le 8 décembre à 9h au TGI de Paris. Le 7 juin 2016, il a été accusé par le chef de la sécurité du MEDEF de « violences volontaires en réunion ». Beaucoup de ‘militant-e-s’ parisien-ne-s connaissent Loïc qui a été de nombreuses luttes, qui a accumulé une expérience qui lui donne assurance et sang-froid. Et quand il accuse le MEDEF de « pour faire taire les oppositions, frapper des manifestants puis les accuser de « violences » », ce n’est pas le chef de la sécurité du MEDEF que ces ‘militant-e-s’ parisien-ne-s croient. S’il devait avoir un procès, c’est peut-être plutôt celui du salarié du MEDEF ? S’il doit y avoir ‘présomption d’innocence’ et ‘circonstances atténuantes’, c’est peut-être plus pour chef de la sécurité du MEDEF, qui avait peut-être reçu des instructions d’agir au-delà de sa propre volonté. Signez l'appel !
La Cie Jolie Môme a profité de ce procès pour faire une action de solidarité, de convergence de luttes et de relance de mobilisation. Ce dimanche 16 octobre au théâtre de l’Epée de bois, à la Cartoucherie, à Vincennes, elle a organisé un Cabaret d’Urgence, sur le thème « C’est l’état d’urgence, tout est permis : Le Medef gouverne, l’État réprime », «  Pour la séparation du Medef et de l’Etat, Contre la répression des gens debout ». J’arrive au début de la troisième et dernière partie de la journée, intitulée ‘l’Etat réprime ‘. Les comédiens de la Cie Jolie Môme, en policier-ère-s dansant-e-s comme dans d’une comédie musicale présentent un « tourbillon d’interventions artistiques et politiques ».
Le journaliste Hervé Kempf de Reporterre présente le rapport « Maintien de l’ordre : la dangereuse dérive », rapport d’information sur les actions de maintien de l’ordre menées depuis le début des manifestations d’opposition à la loi sur le travail en février 2016 (présentation avec recommandations et rapport de 83 pages en PDF). Ce rapport parrainé par un groupe de député-e-s présente des centaines de cas sur 2 ou 3 mois. Des cas de violences sur des journalistes rappellent des méthodes anciennes ou des méthodes de pays qualifiés de dictatures, même si cela n’atteint pas la même gravité.
La conclusion d’Hervé Kempf confirmée par des syndicalistes policiers, c’est que les policiers ont été instrumentalisés en « excitant les violences pour détourner l’attention » de la question sociale et du débat de fond sur le travail.
Aparté : cela me rappelle un chef de CRS devant l’ambassade du Gabon à Paris, le 27 août dernier, jour de la présidentielle au Gabon. Alors, qu’un inconnu pénétrait dans l’ambassade et que la foule craignait l’organisation de fraudes électorales, alors que je m’avançais pour prendre une photographie, ce CRS m’a donné un léger coup de matraque sur les jambes d’une manière injustifiée. Quand je lui ai dit que j’étais journaliste, il m’a répondu « vous n’allez pas m’apprendre mon travail », si, si … que je sois journaliste ou photographe amateur, il n’avait pas à jouer avec son arme à ce moment là. Si la police française veut continuer d’aller apprendre aux polices africaines à ne pas tuer les manifestants comme au Togo avant la mascarade électorale de 2010, il faudrait mieux qu’elle soit constamment professionnelle et précise dans ses réactions, sinon, elle risque d’être accusée d’aller en Afrique pour aider les dictatures à se maintenir. Par la suite, pendant un mois et demi de manifestations devant l’ambassade, les CRS et les RGs ont été corrects. Il y avait un peu de nervosité dans les premiers jours le temps de se connaître et que tout le monde comprennent que manifestant-e-s et policiers étaient tous-tes ensemble contre les voleurs et les criminels. Bref… fin de l’aparté et de l’ironie.
Muriel Guibert, du syndicat Solidaires est venue parler des luttes sociales, du procès des GoodYear, d’Air France, d’une inspectrice du travail et de Téfal. Elle souligne que le vote de la Loi Travail s’est accompagné d’une « régression du droit de manifester et du droit de faire grève », et qu’« une justice au service de l’Etat d’urgence devient la norme ».
Arrive alors sur scène, l’étoile qui éclaire le théâtre de la Belle Etoile, de Jolie Môme, à 70%, j’ai nommé Arlette Laguiller, que j’ai enfin l’honneur de photographier (Le présentateur de Jolie Môme vient aussi de parler de la proximité de la compagnie avec la Fédération anarchiste). La porte-parole de Lutte Ouvrière évoque les ouvriers de l’usine Renault de Bursa en Turquie licenciés pour avoir fait la grève, puis insiste sur les « traces positives » de la lutte contre la Loi Khomry.
La parole passe ensuite à Nina Bianchi, de la Cgt-privés d’emploi à Saint-Etienne. Elle raconte une action de dépose de banderole sur le balcon d’un député et les délires policiers et judiciaires suite à cette action. La jeune et légère femme a été accusée d’avoir frappé 3 CRS et un jeune homme a été accusé d’avoir blessé un énorme groupe de CRS. C’est vrai que parfois, il y a un côté gaulois-es dopés à la potion magique contre les romains au village d’Astérix dans les histoires du Cabaret d’Urgence. A moins que ce ne soient les gendarmes de Saint-Tropez qui auraient pris des substances hallucinogènes mal dosées. En France, aussi, l’humour, c’est important. On ne le dira jamais assez, surtout quand rien ne va plus. Et ce n’est pas tout de faire rire comme les comédiens de Jolie Môme, il faut le dire aussi, sérieusement. Sérieusement enfin, Nina Bianchi explique que maintenant, « l’énergie va à la défense dans les procès », qu’il y a eu « une criminalisation » et « une médiatisation des ‘casseurs’ » pour arriver finalement au passage de la loi par « le 49.3 ».
Ensuite, Agnès Bihl chante le « No flouze blues ». Puis, arrive Renaud Lambert du Monde Diplomatique, qui évoque l’Amérique latine et le Brésil pour conclure sur « l’endormissement face à la gauche » et « la gauche qui gouverne comme la droite ». Facile … La musique reprend avec les Les Fils de Teuhpu. Michel Roger, metteur en scène de Jolie Môme, lit un message de soutien à Loïc de Didier Paillard, le maire de Saint-Denis. Puis, c’est au tour du chanteur Thomas Pitiot.
Guillaume Vadot, Enseignant à l’Université Paris 1, vient témoigner sur l’agression très médiatisée – menace de mort et de viol  - qu’il a subit de la part de policiers à la gare de Saint-Denis, après les avoir filmés en train d’arrêter sans ménagement une femme d’origine africaine. Il faudra bien que la police s’habitue à être filmée partout puisque tous les téléphones sont des caméras.
La Parisienne Libérée vient juste après chanter la philosophie du patron du MEDEF, Pierre Gattaz. Puis le rappeur l’1consolable nous explique pourquoi Hollande et Valls sont bien obligés d’« envoyer le 49.3 » (clip!!). C’est vrai que certains dirigeants socialistes ont eux aussi beaucoup d’humour, et que c’est pour cela qu’ils sont tellement aimés.
La conclusion est laissée à Mickael Wamen, ancien GoodYear, au chômage depuis la fermeture de l’usine délocalisée cet été, avec 800 autres personnes. Le procès en appel des 8 GoofYear condamnés à de la prison ferme, aura lieu de 19 et 20 octobre à Amiens. Sous les applaudissements, il lance que « le combat sur la loi travail n’est pas terminé » parce que sinon c’est la « destruction du code de travail ». Il est pour une contre-attaque juridique contre les violences policières au travers de recours collectif, nouvelle possibilité en France depuis 2014. Il évoque la mémoire d’une douzaine de salarié-e-s décédé-e-s depuis 2014, certain-e-s par suicide et conclut sur l’Etat d’urgence sociale.    
J’ai oublié le musicien Boris Viande quelque part, et je n’ai pas vu, dans les 2 premières parties, les artistes Cie Tamèrantong, Serge Utgé Royo, Fredo des Ogres de Barback, LaTwal , Regis Vlachos et Xavier Mathieu, Sidi Wacho, Waltrudes, La Rabia, Mathieu Barbances, Audrey Vernon. Je n’ai pas non plus entendu les intervenant-e-s : François Ruffin (Fakir), Pierre Rimbert (Monde Diplomatique), Monique Pinçon-Charlot et Michel Pinçon (sociologues), Charles Hoareau (Rouge Midi), Sorya Hocini (Cip-Idf), Agathe Martin (Ex-PSA Aulnay), Olivier Besancenot (NPA), Gérard Mordillat (Réalisateur et romancier), Serge Halimi (Monde Diplomatique), Eric Coquerel (Parti de Gauche), Denis Gravouil (CGT-Spectacle), Gaël Quirante (Sud Ptt92), Julien Bayou (Europe Écologie Les Verts), Denis Vemclefs (Front de Gauche), Jean Baptiste Eyraud (DAL), Jean-Claude Amara (Droit Devant !), Def-Col (Défense Collective), Collectif Zad Notre Dame des Landes de Saint-Denis, Comité du 18 mai.
La journée se termine par le spectacle de Jolie Môme et leur chanson ‘C’est dans la rue que cela se passe’, reprise en cœur par le public. S’il y avait un message à faire passer, il semble qu’il soit passé, même si le public était déjà bien convaincu.
Régis Marzin, article écrit et publié le 18.10.16

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